Pour les lecteurs, assidus de la presse nationale, l'auteur de cet ouvrage est loin d'être un inconnu. Ces dernières années, en effet, M. Ould El Hocine est intervenu de manière régulière, lors de chaque commémoration des grandes dates de l'histoire de la guerre de Libération nationale pour apporter son propre témoignage mais également, et surtout, pour rendre hommage à ses compagnons de maquis morts les armes à la main. Cette fois-ci, c'est par un ouvrage de 214 pages que le moudjahid Ould El Hocine a décidé de témoigner «afin que nul n'oublie». Intitulé Au cœur du Combat, l'ouvrage porte un sous-titre qui souligne et précise davantage encore son sujet : «Récit authentique des batailles du commando Si Zoubir et de la katiba EL Hamdania». L'intérêt et l'originalité de l'ouvrage résultent de l'approche retenue par l'auteur : Témoigner sur les actions et les faits d'armes de deux unités de l'ALN dont il fut membre, deux unités d'élites, un commando et une katiba (une compagnie) comme le précise le préfacier Hadj Benalla, autre personnalité marquante du mouvement d'émancipation de l'Algérie. Formés de combattants aguerris et dotés d'un armement conséquent, ces unités — à l'instar du fameux commando Ali Khodja que dirigea le commandant Azzeddine, autre figure de notre guerre de Libération nationale, de 1957 à fin 1958 — étaient en quelque sorte le fer de lance de l'armée de libération. Pourtant et curieusement, nous dit Hadj Benalla, ces unités ne sont pas suffisamment connues. C'est pourquoi, l'ouvrage d'Ould El Hocine se veut, objectivement, une contribution à la restitution de l'histoire de l'armée de Libération nationale en comblant une importante lacune. L'apport de ce moudjahid est d'autant plus intéressant, qu'il nous donne à voir deux unités de l'intérieur et de manière concrète, agissant de manière efficace, grâce au soutien du peuple. C'est sans doute, grâce à cette communion avec le peuple, auquel Ould El Hocine rend hommage tout au long du livre, que ces unités d'élite ont pu inscrire en lettres d'or de nombreuses actions. Précisons à ce stade que derrière le générique de «batailles» retenu dans le sous-titre, l'on découvre qu'il s'agit essentiellement «d'accrochages» et «d'embuscades» qui sont, comme chacun le sait, les formes d'actions privilégiées de la guérilla révolutionnaire. Le terme de «batailles» n'apparaît, en effet, qu'au niveau du chapitre n°9 (Sidi Semiane, 20 mai 1957) et du chapitre n°15 (Douar Siouf, avril 1958). Quoi qu'il en soit, sur les 15 chapitres de l'ouvrage, quatorze sont consacrés aux faits d'armes collectifs de deux unités combattantes. Seul le premier chapitre relate un attentat perpétré en plein cœur de la ville de Marengo (aujourd'hui Hadjout), au sein de la Mitidja. Cet attentat réalisé par l'auteur, le 13 janvier 1957, avec trois autres compagnons, aura un double effet : en premier lieu, il aura fait cesser la détestable réputation de la ville de Marengo qui était affublée par la population algérienne de la dénomination peu glorieuse de Haouch El hana (littéralement havre de paix), en second lieu, l'attentat réussi, en tant qu'examen probatoire, a permis à Ould El Hocine d'intégrer le commando de Si Zoubir. Mais il ne faudrait surtout pas se méprendre : le présent ouvrage parle moins de son auteur que des compagnons de celui-ci. C'est là, en effet, une qualité supplémentaire du livre qui n'est en vérité que celle de son auteur : la modestie, l'ouvrage en réalité est un long et bel hommage à tous les chouhada du commando Si Zoubir et de la katiba El Hamdania. C'est avec une émotion indéniable qu'Ould El Hocine, qui raconte aussi la vie quotidienne au sein de ces unités combattantes, relate la mort (désignée toujours par le terme arabe d'istischad) de bon nombre de ses compagnons. Cinquante ans après les événements qu'il nous relate, on devine à la lecture de ces pages, la douleur et les larmes de l'auteur même s'il prend soin de nous dire, que dans le feu de l'action, beaucoup de combattants de ces unités souhaitaient mourir en martyrs. Mais toutes les actions sont décrites sans aucune haine même si la violence de la guerre est présente tout au long du livre. L'auteur a, en effet, pris le parti de raconter des faits d'armes auxquels il a participé en refusant d'écrire sur la base des oui-dire. Une telle position est à saluer et à encourager parce qu'elle prémunit contre les dangers des critiques stériles, des attaques personnelles et des règlements de compte relevés dans certains ouvrages parus ces dernières années. C'est à ce prix que les historiens pourront disposer d'un matériau de qualité. Pour tout ce qui précède, l'ouvrage d'Ould El Hocine est, assurément, un élément de ce précieux matériau. Aussi, on ne peut que souscrire à l'appréciation du préfacier, Hadj Ben Alla qui soulignait que «le livre est une contribution précieuse à l'écriture de l'histoire de la guerre de Libération nationale (ALN) en Wilaya IV historique».