Après un week-end violent qui a vu l'interpellation de plus de 400 personnes à Paris, les «gilets jaunes» ont maintenu la pression sur Emmanuel Macron. Ce dernier a demandé à son Premier ministre, Edouard Philippe, de recevoir les chefs des partis de l'opposition ainsi que les représentants des «gilets jaunes». Le but de la réunion gouvernement-«gilets jaunes» est de trouver un accord susceptible de faire baisser la tension et endiguer les violences qui ont touché plusieurs lieux à Paris, notamment l'Arc de Triomphe et les abords des Champs-Elysées. Edouard Philippe a reçu hier les responsables des partis de l'opposition et de la majorité gouvernementale. Il a commencé ses consultations avec Olivier Faure, chef du Parti socialiste. Ce dernier a réclamé la réinstauration de l'impôt sur les grandes fortunes (ISF) et le gel de toutes les nouvelles taxes. De son côté, le chef des Républicains, Laurent Wauquiez, a demandé l'organisation d'un référendum en vue de statuer sur les décisions prises par le gouvernement, telles que l'augmentation du prix des carburants et les diverses nouvelles impositions qui devraient entrer en vigueur en janvier 2019. Par ailleurs, Jean-Luc Mélenchon, chef du parti la France insoumise, a appelé, tout comme Marine Le Pen, à la «dissolution» de l'Assemblée nationale et à l'organisation de nouvelles élections législatives anticipées. Le Premier ministre devrait recevoir aujourd'hui un collectif de «gilets jaunes». Ces derniers demandent l'abandon de l'augmentation des prix des carburants et toutes les nouvelles taxes qui seront imposées à partir de l'année prochaine. De son côté, Matignon a promis de dévoiler de «nouvelles mesures» après les consultations en vue de «permettre le déroulement serein» de la concertation de trois mois voulue par l'Exécutif. Un débat aura également lieu à l'Assemblée nationale mercredi et au Sénat jeudi, en vertu de l'article 50-1 de la Constitution, c'est-à-dire sans que la responsabilité du gouvernement ne soit engagée. Matignon n'a pas précisé dans l'immédiat si ce débat donnerait lieu ou non à un vote. Rentré dimanche d'Argentine, le président Macron ne s'est pas exprimé, mais il a effectué une visite à l'Arc de Triomphe pour constater les dégâts et apporter son soutien aux éléments des forces de l'ordre. Dans la foulée, il a demandé à son ministre de l'Intérieur de «réformer complètement» l'organisation du dispositif de sécurité afin de faire face aux casseurs qui se faufilent parmi les «gilets jaunes». Par ailleurs, le président français, après avoir fait la sourde oreille aux doléances des manifestants, cherche désormais à impliquer les partis de l'opposition dans la gestion de la crise, voire même à partager avec eux la responsabilité de tels événements. Mais force est de reconnaître que sa stratégie, basée sur le refus du dialogue, est devenue intenable au vu des derniers développements. Au sein de la majorité, des fissures commencent à apparaître. Ainsi, le Premier ministre serait plutôt tenté de lâcher du lest, alors que le Président s'arc-boute encore sur ses positions. Alors que l'Exécutif français table sur l'essoufflement du mouvement des «gilets jaunes» à l'approche des fêtes de fin d'année, sur le terrain c'est le contraire qui semble se passer. Entrés en scène, de nombreux lycéens ont fermé une centaine d'établissements à travers toute la France pour protester contre la réforme du baccalauréat. A Aubervilliers, une commune située dans le département de la Seine-Saint-Denis, des casseurs ont mis le feu à une voiture garée à proximité du lycée. Mêmes scènes de violence à Toulouse, Bordeaux, Limoges et Lyon, où les autorités craignent l'agrégation des luttes et l'entrée en scène des lycéens. Spontané, le mouvement des «gilets jaunes» continue de bénéficier du soutien de la grande majorité des Français. Ils étaient la semaine dernière 80% à soutenir l'action de ces manifestants et à trouver «objectives» leurs revendications. C'est cette lame de fond que craint précisément Emmanuel Macron qui, par son intransigeance, a divisé les Français en leur imposant ses réformes fiscales. Mais sa stratégie, si elle n'est pas révisée, est porteuse d'une irrémédiable fracture sociale au vu de la contestation qui s'exprime dans la rue et qui se radicalise, s'élargissant à de larges pans de la population.