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Expressions du désert-Roman
Publié dans El Watan le 27 - 09 - 2007

Revenons un peu sur l'origine du mot qui peut nous éclairer sur la perception que l'on se fit ailleurs de ces étendues nues et arides. Désert vient du verbe latin desero qui signifie «abandonner», qui marque la séparation.
Lorsque l'Afrique du Nord est devenue romaine, sous le règne de l'empereur Hadrien, des détachements de centurions surveillaient le trafic saharien et les tribus berbères insurgées dans les régions qui correspondent aujourd'hui à celles de Biskra et Laghouat. Et pourtant, ce territoire, appelé «zone torride», semblait complètement à l'écart. L'historien Pline l'Ancien le dit clairement : «La zone torride n'a jamais été soumise par Rome mais détachée du reste du monde, elle est vouée à la solitude par les excès de la Nature» (Histoire naturelle, II). Le climat, qui semblait insupportable aux Romains, ne pouvait convenir, selon eux, qu'à des créatures hors normes, seuls êtres vivants pouvant supporter ces températures. L'imagination allant bon train, le même Pline se laissa aller à des descriptions extravagantes de troncs sans tête, de pieds en lanières, de corps incohérents représentant une nature illisible à la logique romaine. Les écrivains algériens, quant à eux, ont une attirance particulière pour leur désert, le Sahara, qui va apparaître d'une façon ou d'une autre dans leurs écrits. Mohammed Dib ne manque pas de le souligner, lui qui attribue une importance primordiale au paysage qui nous a vu naître : «Les Algériens vivent avec, à leur porte, un des plus grands déserts du monde. Même s'ils l'ignorent, même s'ils l'oublient, il est là et non pas qu'à leur porte mais dans la sombre crypte de leur psyché.» (L'arbre à dires, Albin Michel, 1998). Au plus profond de nous-mêmes, dans cet endroit secret qui est à la fois lieu du repli et source de vie, nous gardons cette image d'infini et de beauté.
Aux temps lointains, les caravanes s'organisaient pour traverser ces espaces arides où la survie dépend de la solidarité. Le beau livre de Djamel Souidi Amastan Sanhadji nous raconte (tome II. Ed. du Tell, 2004), comment les méharis sont dressés, comment la caravane se met en chemin et quelles embûches l'attendent en chemin. Car la traversée est difficile et les précautions indispensables. Des êtres de légende sont nés en ces lieux. C'est le cas de Tin-Hinan et l'auteur nous donne sa version de cette histoire sans cesse reprise et modifiée. C'était une princesse très chère à son père. Elle fit un songe merveilleux. Elle devait quitter sa demeure pour aller vers le pays du soleil levant où s'accomplirait sa destinée. En ce temps-là, nous dit le conteur, les hommes étaient proches de la nature. Aussi, obéit-elle sans hésiter malgré la douleur de laisser son père. Elle partit avec sa servante fidèle et trois chameaux. Elles cheminèrent longtemps, elles eurent faim et soif et ne durent leur salut qu'à une procession de fourmis qui transportaient des graines. Elles purent ainsi continuer et arriver là où le destin allait s'accomplir. La princesse épousa un guerrier noble et brave et de leur union naquit le peuple des Sanhadjas. Elle prit le nom de Tin-Hinan qui signifie pour certains «la voyageuse» et, pour d'autres, «celle des tentes» car elle eut de nombreux enfants et les tentes se multiplièrent autour de la sienne. Les histoires abondent de ces caravanes qui traversent le désert et emportent avec elles des rêves d'évasion et des regrets aussi. Elles laissent derrière elles des empreintes évanouies, traces de campements abandonnés, prétextes à la poésie et à l'évocation d'un amour perdu.
Se perdre, se retrouver
Mouloud Mammeri dans La Traversée (Plon, 1982) nous décrit la quête de Mourad, journaliste, qui se retrouve après une traversée du Sahara. Ses pérégrinations servent de révélateur et la vie des hommes libres, les Touareg, lui montre à quel point sa propre existence peut être étriquée. L'histoire s'achève tragiquement sur une plage. Rachid Boudjedra dans Timimoun (Denoël, 1994) nous raconte son désert à lui. Dans un car bringuebalant, un chauffeur, livré à ses réflexions solitaires, revoit son passé. De temps en temps, son regard est attiré par l'une des passagères, une jeune fille au regard bleu et au corps androgyne. Par intermittence, parviennent, par bribes les nouvelles du Nord, les morts, les attentats, toute cette horreur qui semble lointaine et comme atténuée par le désert que le personnage principal n'aime pas et semble même craindre : «Personne ne connaît la souffrance s'il n'a pas regardé du haut de l'Assekrem ce chamboulement cosmique qu'est le Hoggar. Cette désintégration lunaire où la rocaille, le sable, les dunes, les crevasses et les pics majestueux donnent envie de mourir tout de suite. Le Sahara c'est ce grabuge incroyable du monde.» Au terme de ce voyage qui le conduira surtout vers sa vérité, il se découvrira lui-même. Le désert sert de révélateur.
C'est ce qu'exprime Mohammed Dib dans Le Désert sans détour, où l'on peut lire : «Le désert offre cette revanche cette autre particularité qu'on y marche vers soi-même et ainsi vers le malheur.» Plus tard, Boudjedra reviendra à la poésie non sans nostalgie et souffrance dans Cinq fragments du désert, (Barzakh, 2001) variations sur un poème de Saint John Perse. Habib Ayyoub imagine un désert encore plus désert, et dans le Gardien (Barzakh, 2001), il nous invite à une fable philosophique : un homme, perdu dans un ksar abandonné de tous, vit de ses souvenirs. Autrefois, il y avait une mer et comme vestige de ce passé révolu, un bateau, un yacht avec des voiles en lambeaux. Le sel envahit tout et ce chef suprême, perdu dans sa solitude, finit par mourir. Le désert est symbole de solitude. L'inanité des quêtes humaines et des récompenses, comme les décorations, tout se fond et se corrompt sous l'effet corrosif du sel qui attaque tout. Alors que reste-t-il ? Des médailles conservées précieusement dans une boîte, symbole d'une époque plus faste et de la reconnaissance de ses pairs. Il n'en subsiste que le ruban en plastique, rouge, vert et blanc, «le résumé de sa vie», réduit à néant. On aura compris qu'il s'agit surtout, sur fond de satire, de la vie algéroise, comme le prouvent certaines indications de lieux, d'une réflexion triste et amère sur la condition humaine et l'impuissance des hommes qui, parvenus au terme de la vie, contemplent avec un sentiment de vide ce que fut leur parcours sur terre. Dans tous ces ouvrages, les auteurs ont montré comment le désert permet une découverte de soi.
La quête mystique
Le désert est surtout le lieu des expériences mystiques où l'homme, rendu à sa condition d'être faible et contingent, mesure mieux la grandeur d'une puissance qui le dépasse. Les ermites choisissent d'y vivre pour mieux y méditer et réaliser leur quête d'absolu. C'est l'endroit où la parole de Dieu s'est fait entendre. Et c'est l'endroit où la source miraculeuse jaillit pour sauver Ismaël et sa mère Agar. «L'enfant Ismaël, chassé de la maison paternelle avec Agar sa mère, était sur le point de mourir de soif dans le désert ; alors elle l'a mis à l'abri du soleil dans un buisson, mais une source d'eau a jailli sous le talon d'Ismaël», nous conte Mohammed Dib dans l'Infante Maure (Albin Michel, 1994). Il nous semble alors retrouver en ces phrases simples une ultime vérité que plusieurs autres auteurs algériens ont recherchée, tels Tahar Djaout, Malika Mokaddem ou encore, dans la nouvelle génération d'écrivains, Chawki Amari. Le désert, lieu des vertiges et des mirages, est aussi pour l'écrivain, un miroir de sa création. Le désert se donne à lire «comme une page blanche qu'une nostalgie du signe consume», nous dit encore Mohammed Dib. Page blanche en attente du signe, page blanche de l'écrivain en proie aux difficultés de la création littéraire. Les écrivains algériens ne finissent pas de parcourir ces espaces porteurs de tant de rêves…


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