Les condoléances de Tebboune pour la mort en martyr du pilote Bekouche Nasser    Appel à la vigilance des agriculteurs    Nadir Larbaoui préside une réunion du Gouvernement    « L'Algérie est un modèle à suivre en matière de lutte contre le terrorisme »    Près de 100.000 personnes ont dû fuir des violences armées    A l'horreur s'ajoute l'asphyxie humanitaire    Netanyahou tue 404 Palestiniens pour reporter son audition par la justice    Tournoi de la presse : Les 8es de finale lancés    A Gaborone pour la victoire...    Coupe d'Algérie 2025 (1/4 de finale) : Les dates et les stades connus    Plus de 800 g de kif traité saisis, une arrestation    Plus de 100 g de kif traité, 401 comprimés de psychotropes saisis, trois arrestations    De la viande avariée impropre à la consommation saisie à Hassi Mamèche    L'autre lutte pour le recouvrement de l'indépendance    Guelma accueille la 9e édition    Dans l'imaginaire littéraire et artistique algérien    Le documentaire "Les prisonniers algériens de Sainte-Marguerite" projeté à Alger    Enseignement supérieur: lancement de la première édition du Prix du président de la République du chercheur innovant    Former un front médiatique national pour défendre l'image de l'Algérie    Algérie-Tunisie: les ministres de l'Intérieur soulignent leur volonté commune de contrer les phénomènes négatifs dans les zones frontalières    Boughali reçoit l'ambassadeur du Mozambique à Alger    Secousse tellurique de magnitude 3,2 degrés dans la wilaya de Médéa    63ème anniversaire de la fête de la victoire: diverses activités dans l'Est du pays    ANP: mise en échec de tentatives d'introduction de plus de 30 quintaux de drogue en provenance du Maroc    Le président de la République présente ses condoléances suite au décès en martyr du pilote Lieutenant-Colonel Bekkouche Nasr    Textiles et cuirs: le chiffre d'affaire du groupe public Getex augmente en 2024    Agression sioniste contre Ghaza: au moins 970 martyrs en 48h    Compétitions interclubs de la CAF 2024-2025: les dates et les horaires des quarts de finale connus    Les revenus générés par les produits forestiers dépassent le milliard de dinars    Rebiga préside la cérémonie du 63e anniversaire de la Fête de la Victoire à la place de la Résistance à Alger    Le ministre tunisien de l'Intérieur visite la Direction des titres et documents sécurisés d'El-Hamiz    Massacre sioniste à Ghaza: "Les attaques doivent cesser sans plus attendre"    Ligue 1 Mobilis: le CRB écope d'un match à huis clos, un match de suspension pour Ramovic    Mondial 2026/Botswana-Algérie: premier entraînement des Verts à Gaborone    «Loyauté envers les martyrs»    Manifestations à Washington et New York pour exiger la libération d'un étudiant miilitant palestinien        L'Algérie happée par le maelström malien    Un jour ou l'autre.    En Algérie, la Cour constitutionnelle double, sans convaincre, le nombre de votants à la présidentielle    Algérie : l'inquiétant fossé entre le régime et la population    Tunisie. Une élection sans opposition pour Kaïs Saïed    BOUSBAA بوصبع : VICTIME OU COUPABLE ?    Des casernes au parlement : Naviguer les difficiles chemins de la gouvernance civile en Algérie    Les larmes de Imane    Algérie assoiffée : Une nation riche en pétrole, perdue dans le désert de ses priorités    Prise de Position : Solidarité avec l'entraîneur Belmadi malgré l'échec    Suite à la rumeur faisant état de 5 décès pour manque d'oxygène: L'EHU dément et installe une cellule de crise    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Ali Bensaad. Maître de conférences, université de Provence, enseignant-chercheur CNRS/IREMAM
Publié dans El Watan le 13 - 03 - 2008

– Pour «contenir» les flux migratoires irréguliers vers l'Europe, les Etats du Maghreb privilégient la logique répressive. Dans vos travaux sur la question des migrations, vous avez souvent mis en avant ce rôle de «supplétifs de la répression» que remplissent avec zèle les Maghrébins.
En quoi consiste-t-il au juste ?
– Le caractère spectaculaire que revêt actuellement le phénomène des harraga en Algérie remet les choses en place : les Maghrébins qui font la police pour l'Europe ne sont pas du bon côté du bâton, même s'ils jouent à l'oublier. Alors qu'elle se félicite de la chute du mur de Berlin, l'Europe pousse les pays du Maghreb à inventer le crime d'«émigration illégale». Du point de vue du droit international, ce qui est criminel ce n'est pas le fait pour un individu d'émigrer, c'est le fait pour une autorité publique de tenter de l'en empêcher. Ce phénomène remet également au jour une vérité occultée : les migrations irrégulières concernent plus les Maghrébins, Algériens compris, que les Subsahariens, alors que la focalisation est faite sur ces derniers et que le discours officiel maghrébin y a trouvé un moyen d'occulter le drame culpabilisateur de ses propres migrants en le «transférant» sur le «bouc émissaire» subsaharien. Les Subsahariens n'ont fait que se greffer, tardivement, sur des «interstices» ouvertes par les Maghrébins qui étaient et continuent à être largement majoritaires. Prenons le cas des Algériens. Alors qu'aucune tentative ne se faisait depuis les côtes algériennes, et au moment même où l'Algérie s'employait à refouler les migrants africains, ils étaient déjà pourtant nombreux à tenter la traversée par le Maroc et proportionnellement, de loin, plus nombreux que les ressortissants de n'importe quel autre pays africain. Ainsi, certes beaucoup moins nombreux que les Marocains, les Algériens n'en étaient pas moins, après ces derniers, la première nationalité africaine par le nombre d'expulsés d'Espagne dans les premières années 2000 où elle surclasse de loin toutes les autres nationalités africaines. Les seuls Espagnols avaient pour la seule année 2002 renvoyé 2500 Algériens (exactement 2449), qui avaient traversé irrégulièrement la Méditerranée. Pour combien qui ne l'ont pas été ? Ce chiffre est à comparer à l'actuel : durant les 9 premiers mois de 2007, 1396 Algériens ont débarqué en Sardaigne. Mais avant, cette réalité n'était alors pas dérangeante parce qu'elle se déroulait loin du pays. Pendant ce temps, en Algérie comme dans tout le reste du Maghreb, le discours officiel avait réussi à réduire la question migratoire à celle des Subsahariens et à faire de sa gestion, qui lui a été imposée par l'Europe, une nouvelle ressource politique pour mieux négocier avec celle-ci notamment la pérennité des régimes.
– Une pérennité «négociée» au détriment de la jeunesse maghrébine…
– Le résultat paradoxal de la répression exercée par les Maghrébins, dont l'Algérie, contre les migrants subsahariens est qu'elle se retourne d'abord contre leurs propres enfants. C'est parce que les pays maghrébins ont durci «la chasse aux migrants» que les Algériens ne peuvent plus utiliser les passages fonctionnels et moins dangereux dans les pays voisins et qu'ils ont donc été amenés à prendre plus de risque en partant de l'Algérie, dont les itinéraires sont plus dangereux.
Si les Marocains ont fait du zèle jusqu'à aller tirer, en octobre 2005, sur les migrants subsahariens à Ceuta et Melilla, près de 1000 de leurs jeunes sont détenus dans des conditions moyenâgeuses en Libye qui, selon un rapport de Frontex (l'Agence européenne des frontières extérieures), chargée de la lutte contre les migrants et qui ne peut être soupçonnée d'hostilité aux pays qui l'aident dans sa tâche, détient plus de 60 000 migrants prisonniers. Il n'y a pas de raison qu'il n'y ait pas parmi eux des Algériens comme tendraient à le confirmer les témoignages recueillis sur le terrain auprès des migrants. On sait d'ailleurs qu'il y a eu des familles qui ont saisi le gouvernement à propos de morts suspectes au large de la Tunisie et de la Libye. Mais cette participation des pays maghrébins à la répression tue aussi des enfants maghrébins. Ainsi, si la Libye obtient et demande des moyens pour traquer les migrants ( le même rapport de la Frontex, rapport de mission mai-juin 2007, rapport destiné à l'UE et qui a été ébruité par des fuites, cite en détails des moyens exorbitants en hélicoptères, avions, moto-vedettes, 4×4, etc), le nombre de morts s'accroît : sur le seul canal de Sicile, passage privilégié des Maghrébins et des Algériens, le nombre de morts, qui était de 302 en 2006, a atteint le chiffre de 502 rien que pour les neuf premiers mois de 2007 et, bien sûr, parmi eux beaucoup de Maghrébins et d'Algériens.
– La dégradation socioéconomique explique-t-elle à elle seule l'explosion de ce phénomène ?
– Plus que le contexte de dégradation socioéconomique, c'est l'impasse et l'absence de projet de société, la certitude de ne pas pouvoir se réaliser dans le système tel qu'il est qui poussent ces jeunes, dans un sursaut de survie, à se détourner rageusement du pays. Ce sont les plus «riches» de ses enfants qui réagissent ainsi : riches de volonté, d'imagination et de désir de vivre. Ils ont autant, voire plus de courage que leurs aînés qui ont fait cette guerre de libération devenue une rente et le moyen de culpabiliser toute une jeunesse de n'être pas née déjà pour la faire. Il ne sert à rien de leur faire la morale sur le caractère suicidaire de leur geste. Leur choix n'est pas le bon et ce n'est peut-être pas le meilleur mais ils pensent que le suicide le plus garanti est celui de subir la situation qu'on leur impose au pays. Ils savent que le système est suicidaire et autiste. Plus que la dégradation des conditions socioéconomiques et même plus que l'absence de démocratie, c'est la déliquescence du sens de l'Etat et la certitude qu'il n'existe plus de contrat social, même injuste, qui sont en train de souffler un vent de panique sur les couches moyennes. Les harraga sont le grain de sable qui fait éclater l'aporie des discours officiels et contraignent la classe politique à revenir au réel.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.