Rome : De notre correspondante Les conditions météorologiques, bien que favorables à la navigation en ces derniers jours du mois d'août, n'étaient pas clémentes pour cette expédition improvisée. Les vagues d'une mer légèrement agitée ont failli faire retourner les embarcations avec leur chargement d'aventuriers. Seule l'intervention des patrouilleurs italiens leur a évité le pire. Un second groupe, aperçu le même soir et comptant 52 harraga, a été intercepté par une corvette de la capitainerie du port de Cagliari. Quelques heures après, ce sont 35 autres algériens, entassés dans une seule barque, qui ont été secourus par les gardes-côtes sardes. Parmi eux, se trouvaient huit femmes et deux mineurs. Il semble que même les femmes commencent à se laisser envoûter par les promesses folles de passeurs sans scrupules. Enfin, une douzaine d'autres harraga, qui sont parvenus avec leur embarcation aux alentours de la petite île sarde de Sant'Antioco, ont été arrêtés par la capitainerie du port de l'îlot. En tout, 10 barques avec leur 198 passagers, dont plusieurs se trouvaient en difficulté au moment de leur interception, ont été bloquées en une seule nuit par les autorités italiennes. Après avoir reçu les premiers secours et après les opérations d'identification, les nouveaux arrivés ont été transférés au centre d'accueil d'Elmas, qui est plutôt un établissement de détention. La structure, ouverte il y a deux mois dans la périphérie de Cagliari, non loin de l'aéroport, a été construite spécialement pour y enfermer les algériens qui débarquent sur l'île sans autorisation de l'administration italienne. Mais il arrive que la vigilance des gardes-côtes sardes soit flouée et que l'un des interminables débarquements de nos compatriotes ne soit pas immédiatement détecté. Il y a une semaine, le 22 août, 9 jeunes, arrivés en Sardaigne via la mer Méditerranée, sans être interceptés sur les côtes sardes, ont été néanmoins localisés, alors qu'ils erraient, désorientés, aux alentours d'une base militaire, dans la commune de Capo Teulada. Arrêtés par les carabiniers et suspectés d'être des terroristes ou des espions au service d'une puissance étrangère, ils ont été conduits au centre de détention d'Elmas. Parmi les derniers harraga débarqués sur l'île, plusieurs ont été accusés d'être les passeurs du groupe, donc arrêtés et incarcérés. La loi italienne réprime sévèrement l'activité de soutien et d'encouragement à l'immigration clandestine et assimile l'exploitation à des fins lucratives de cette dernière aux délits mafieux. Bien que détenus et privés de leur liberté dans le centre d'Elmas où ils séjourneront avant leur expulsion, sur des vols charters vers l'Algérie, pays qui a donné depuis un an son feu vert à l'exécution manu militari du rapatriement des harraga, une fois leur nationalité avérée, les derniers rescapés peuvent se considérer chanceux. Eux, au moins, ils ont échappé au sort tragique de 71 immigrés d'origine africaine, dont 4 femmes enceintes et un enfant, qui ont trouvé la mort, il y a six jours, dans les eaux maltaises, près du Canal de Sicile. Huit de leurs compagnons de mésaventure, secourus par un chalutier maltais, alors qu'ils sont restés agrippés des jours durant aux restes de leur barque, ont raconté les circonstances de ce énième naufrage de jeunes africains désespérés qui quittent leur continent pensant trouver le paradis en Europe, mais finissent engloutis par les flots de la Méditerranée. Des cadavres flottants aperçus hier par un hélicoptère de l'armée allemande qui participe à l'opération Nautilus 3, qui fait partie de la mission de Frontex de l'Union européenne pour le contrôle des frontières, confirme cette dramatique version des rescapés. Le Haut Commissariat pour les Réfugiés des nations unies a demandé aux autorités maltaises de porter secours aux immigrés survivants et d'effectuer des recherches pour localiser les corps des personnes qui ont péri dans le naufrage.