Le terrorisme islamiste est-il en train de s'installer et de s'enraciner au Koweït ? Depuis quelques mois les informations sécuritaires qui proviennent de ce pays présenté comme un havre de paix font état d'affrontements sanglants entre groupes armés et forces de sécurité et d'arrestations d'activistes de nationalités kowétienne mais aussi étrangère, notamment saoudienne. Hier, un accrochage de plus d'une heure a eu lieu à Salmiya, une banlieue de la capitale, qui s'est soldé par un islamiste présumé, un officier des services de sécurité et un civil de nationalité bahreinie tués, selon un communiqué du ministère kowétien de l'Intérieur. Il s'agit du troisième affrontement depuis le début de ce mois. Le 10 janvier, un accrochage toujours dans la capitale s'était soldé par la mort de deux policiers et d'un activiste d'origine kowétienne. Une semaine plus tard, le 15 janvier dernier, les services de sécurité kowétiens avaient tué un suspect saoudien lors d'un affrontement avec un groupe islamiste près de la frontière avec l'Arabie Saoudite. Cette activité terroriste inquiète au plus haut point les autorités kowetiennes qui redoutent l'exportation du péril terroriste de leur voisin saoudien où les éléments d'Al Qaîda ont élu domicile multipliant les attentats ciblés, visant les sites stratégiques du pays et les interêts étrangers. L'idéologie wahhabite est désormais perçue comme une véritable menace pour la stabilité du pays. Le paradoxe de l'histoire a voulu que le mal terroriste qui ronge le Koweït vienne du même pays qu'il avait trouvé à ses côtés lors de l'invasion de ce pays en 1990 durant la première guerre du Golfe. Au cours de cette dernière décennie et mettant à profit la « percée » du mouvement islamiste et fondamentaliste dans certains pays qui ont servi de sinistres laboratoires avec les conséquences que l'on sait, le courant islamiste légal au Koweït n'a pas hésité à chevaucher la vague islamiste ascendante en investissant les institutions du pays, notamment le Parlement. Les autorités kowétiennes ont peut-être eu tort de croire que le phénomène de l'islamisme pouvait être traité uniquement par les moyens politiques. La marginalisation du courant islamiste lors des dernières élections où sa présence au Parlement est devenue plus que symbolique n'a pas pour autant éloigné le spectre du terrorisme islamiste. Ebranlées par la montée de la violence, les autorités kowetiennes ont mis leurs forces de sécurité en état d'alerte maximale et formé une cellule de coordination entre les divers services de sécurité pour faire face à la situation. Des dispositifs de sécurités renforcés ont été déployés autour des installations vitales, notamment pétrolières d'où le pays tire l'essentiel de ses ressources. Au plan législatif, le gouvernement s'apprête à relancer un vieux projet de loi sur l'interdiction de possession d'armes non autorisées. Des caches d'armes et d'explosifs ont été découvertes il y a quelques jours au sud de la capitale. Certains milieux politiques libéraux kowétiens avaient rendu le gouvernement responsable de la montée de la violence dans le pays pour son long flirt avec les islamistes. Les avis restent toutefois partagés au Koweït sur l'ampleur et la gravité du phénomène terroriste qui secoue le pays. Si de nombreux Kowetiens se préparent au pire avec les alertes successives de ces derniers jours, d'autres plus optimistes, estiment en revanche que « les raisons (du terrorisme) qui existent en Arabie Saoudite n'existent pas au Koweït qui jouit d'une liberté d'expression, d'un système judiciaire indépendant et d'un Parlement ». L'avenir nous dira si le Koweït est réellement prémuni contre le danger de l'intégrisme islamiste.