Je crois qu'il faut induire la lecture. Pour cela, il faut de bons livres, de raconter de belles histoires. C'est la seule manière de réussir dans la vente des romans», estime-t-elle. Selon elle, ce qui est valable pour le livre, l'est également pour le cinéma. Elle cite le dernier long métrage de Lyès Salem, Mascarade. «Ce film a a plu au public, parce qu'il raconte une histoire d'Algériens, exprimée en algérien, ni en arabe classique ni en français. Il faut raconter des histoires qui ressemblent aux gens», explique-t-elle. Le prix a un effet relatif sur les décisions d'achat. «Il y a des livres à 1200 DA et d'autres qui sont à 600 DA, mais qui ne se vendent pas. Il faut trouver l'équilibre pour ne pas dépasser un certain seuil des prix», note Yasmina Belkacem. Medjebri Ghazi de Union des éditeurs tunisiens (UET) estime que la lecture dans son pays est à l'image de ce qui se passe dans le Monde arabe, «relativement mauvaise». «Comparée à ce qui se passe au Nord de la Méditerranée, c'est insuffisant par rapport à ce que nous souhaitons», relève-t-il. «Il y a un changement dans les habitudes de lecture. Les sections littéraires, après le bac, représentait 70 %. Ces dernières années, cette tendance s'est renversée.Actuellement, 20 % des étudiants s'orientent vers les sections littéraires, la lecture a suivi. A un moment donné, il y avait une forte demande sur les livres de littérature et de religion. Aujourd'hui, c'est le contraire. Les manuels techniques et scientifiques sont les mieux vendus», explique Medjebri Ghazi. Chaque année, 1700 titres sont édités en Tunisie dont 500 nouveautés. La moitié des 130 éditeurs tunisiens sont affiliés à l'UET. Présent au Salon d'Alger depuis 2000, l'UET expose cette année 1000 titres traitant de l'électronique, de l'architecture, de l'histoire. Pas d'ouvrages politiques ! Côté algérien, les éditions Chihab ont acheté les droits du dernier livre de la journaliste française Florence Beaugé, Algérie, de la guerre à la mémoire , recueil des articles publiés dans le Le Monde sur la torture pratiquée par l'armée française en Algérie. Algérie, une guerre sans gloire.Histoire d'une enquête, publié en 2005, Florence Beaugé avait expliqué comment elle avait travaillé sur un sujet encore sensible en France. Ses révélations lui ont valu des procès . Un essai écrit en arabe du sociologue Nacer Djabi, Algerie, l'Etat et les élites est proposé au Sila par les éditions Chihab. «C'est un travail intéressant sur la classe moyenne, sur les raisons de la crise et sur la fracture entre francophones-arabophones exploitée par les pouvoirs en place», expliqué Yasmina Belkacem. Les éditions Barzakh proposent, elles, en co-édition avec Actes Sud (France) un beau livre du plasticien Rachid Koraïchi, Les ancêtres liés aux étoiles ainsi que des nouvelles de Malek Alloula, Le cri de Tarzan, et Kamel Daoud, La préface du nègre. Chez le mêm éditeur, notons des essais d'écriture collective comme Derrida à Alger et L'image de la femme au Maghreb. Côté débats, Yacef Saâdi, dans un espace aménagé par l'ANEP, a rendu un hommage à P'tit Omar «poussé par les circonstances à battre les sentiers de la guerre». Agent de liaison à 13 ans, Omar Yacef fut tué en octobre 1957 dans le dynamitage d'un refuge à La Casbah aux côtés de Hassiba Ben Bouali, Ali la Pointe et Mahmoud Bouhamidi. Yacef Saadi a relaté la rencontre entre P'tit Omar et Larbi Ben M'hidi dans la maison de Djamila Bouhired. «Ben M'hidi a enlacé l'enfant, lui disant qu'il sera dorénavant son fils. Etant son oncle et vu les conditions de la guerre, j'avais ressenti comme un besoin d'avoir un jeune débrouillard à mes côtés, un jeune capable. Omar ne m'a plus jamais quitté», a-t-il raconté. Yacef Saâdi a appelé les jeunes présents à réussir «la révolution scientifique».