Existe-t-il un tracé officiel délimitant les frontières entre l'Algérie et le Maroc ? En tout cas, sur le terrain, la seule loi qui départage les deux pays, c'est celle des incursions subtiles de l'armée marocaine et sa force de persuasion… par des « textes réglementaires » qu'eux seuls détiennent, apparemment… Mercredi, vingt agriculteurs de la localité de Boukanoun (100 km de Tlemcen) ont été surpris par des soldats marocains les enjoignant d'arrêter leurs travaux de curage et de nettoyage d'une petite rivière, sous prétexte qu'elle est toujours l'objet de litige et tant que les deux gouvernements n'ont pas encore ratifié le tracé frontalier, les Algériens n'y auront pas droit d'accès. « C'est vraiment curieux, nous avons toujours puisé de l'eau de cet oued pour l'irrigation de nos terres, aujourd'hui qu'on a voulu le nettoyer parce que pollué, voilà que les soldats marocains sont intervenus pour nous intimer l'ordre d'interrompre notre travail », indiquent, interloqués, les fellah. Pour information, les localités algériennes de Boukanoun et celle de Ahfir sont séparées par une rivière et depuis de longues années, les cultivateurs des deux pays y puisent l'eau sans aucun problème. Un accord tacite, en quelque sorte, qui arrangeait toutes les parties. Selon des sources sécuritaires, sitôt l'incident éclaté, le chef de la daïra de Marsat Ben M'hidi, dont dépend Boukanoun, accompagné de responsables des garde-frontières (GGF), s'est rendu sur les lieux pour constater les faits. Ils ont trouvé sur place des chefs militaires du royaume, dont le commandant de la gendarmerie royale de Berkane (Maroc oriental). On n'en sait pas plus à l'heure qu'il est. Cependant, nos sources affirment que les services du cadastre de la wilaya de Tlemcen s'étaient déplacés hier sur les lieux du conflit. Cet incident survient quelques mois après un autre produit pratiquement dans la même région, à Ouled Mellouk précisément (daïra de Maghnia), où un matin des engins de sociétés marocaines s'étaient introduits sur le territoire algérien pour l'extension d'une route. Il a fallu l'intervention de propriétaires terriens, puis celles des gendarmes algériens pour arrêter les travaux. Là encore, les services du cadastre algériens s'étaient rendus sur les lieux. Et depuis, le problème est resté en suspens. Nous y reviendrons…