Arrivé début novembre en rade de Mostaganem, cet immense navire-atelier - mesurant hors tout 147/47,5 m et nécessitant un tirant d'eau supérieur à 18 mètres - est au cœur d'une procédure judiciaire. Il a été acquis par six opérateurs - deux Syriens et quatre Algériens - auprès des chantiers navals d'Ukraine. Il aurait été acheté pour la somme de 29 930 000 euros. C'est sur cette base qu'une facture sera établie puis présentée aux douanes algériennes pour son admission. Les propriétaires qui avaient opté pour le port de Mostaganem auraient été dissuadés par l'exiguïté du tirant d'eau du bassin. Le navire est alors orienté vers Arzew dont il atteindra rapidement la rade. Mais au lieu de faire procéder à son dédouanement par les douaniers locaux, il sera fait appel à ceux de Mostaganem. C'est ainsi que deux inspecteurs se déplaceront le 6 novembre dernier à Arzew et procèderont aux formalités d'admission. Une procédure que la toute nouvelle institution de lutte contre la fraude relèvera dès la réception du dossier. la justice se saisie du dossier Déclenchant ainsi une enquête qui mettra en branle plusieurs services de l'Etat. C'est ainsi que les deux frères syriens - dont les passeports avaient été préalablement retirés - ainsi qu'un de leurs partenaires algériens seront entendus par le juge et placés sous contrôle judiciaire pour infraction à la législation des changes. De son côté, la commission dépêchée par le centre de lutte contre la fraude questionnera responsables et agents des douanes de Mostaganem. Dans la foulée, l'inspecteur et le responsable du service commercial seront suspendus. Ils auraient été auditionnés par le juge d'instruction en qualité de témoins. La principale controverse porte, pour l'instant, sur l'état du mastodonte et sur le prix déclaré. Certaines sources estiment que la facture aurait été gonflée de quelques millions d'euros afin de faire profiter du transfert les opérateurs. Par contre, d'autres interlocuteurs nous affirmeront que ce prix correspond bien à la valeur réelle de cet énorme atelier flottant. Une affaire d'expertise que seule une structure habilitée et dûment qualifiée pourrait assumer. Selon certaines indiscrétions, le bureau d'expertise Russian Maritim, qui aurait certifié l'état du navire, justifiant ainsi le prix porté sur la facture, serait crédible tant au niveau international qu'en Algérie. L'avocat des armateurs que nous avons rencontré à Mostaganem affirmera que l'entreprise devrait créer plusieurs centaines d'emplois en phase de lancement, pour doubler ce chiffre en vitesse de croisière. Concernant les expertises et le transfert d'argent, l'avocat du groupe d'armateurs nous dira que Vérital - version algérienne de Véritas International - aurait délivré une expertise qui justifierait les sommes déclarées en douanes et qui mettrait en exergue l'état neuf du navire. Quant au transfert d'argent, l'opération avait été bloquée au niveau de la banque. Toutefois, d'autres sources parlent du transfert d'un premier acompte s'élevant à 1,6 million d'euros. Seules l'instruction et l'expertise judiciaires seraient en mesure de démêler cet écheveau. Néanmoins, les trois autres partenaires, tous de nationalité algérienne, n'auraient pas encore été entendus par les enquêteurs.