Ce sont, en effet, des dizaines de milliers de téléphones mobiles de toutes marques qui entrent régulièrement dans notre pays à travers ces canaux. Les services des douanes ne réagissent pas face à ce fléau, qui saigne notre économie et met en péril les entreprises commerciales agréées, qui ne peuvent pas faire face à une concurrence aussi déloyale. Il faut, en effet, savoir qu'en prenant des voies détournées du commerce informel, les téléphones portables provenant du Maroc et de Grande-Bretagne échappent au paiement de la TVA (17%), de la taxe douanière (5,25%), de la TAP (2%) et environ 4% de frais divers d'exploitation. Ce sont, donc, pas moins de 28% de charges auxquelles échappent les contrebandiers de téléphones portables. Ils peuvent, de ce fait, écouler ces appareils sur le marché algérien à des prix imbattables, sur lesquels les importateurs agréés ne peuvent, à l'évidence, s'aligner parce qu'ils seraient obligés, dans ce cas, de s'acquitter de tous les droits et taxes appliqués à ce type de produits. La concurrence déloyale, qui s'est installée à la faveur de cette contrebande effrénée, affecte déjà plus de 45% du marché national de la téléphone mobile et si les services des douanes ne réagissent pas rapidement et énergiquement, il est sérieusement à craindre que le marché informel ne domine largement ce segment de marché, dans les prochaines années, selon un représentant d'une grande marque asiatique installé depuis une dizaine d'années en Algérie. Certaines grandes sociétés de téléphonie mobile, à l'instar de Sony-Ericsson et Motorola, ont, nous apprend-on, déjà fermé leurs bureaux à Alger et d'autres menacent de suivre, si cette situation maintes fois portée à l'attention des autorités concernées, venait à perdurer. Il y a, ajoute-t-il, péril en la demeure et c'est pour cela qu'il est aujourd'hui urgent que les services des douanes et de sécurité aux frontières luttent contre ce fléau qui, cause un énorme préjudice financier non seulement à l'Etat (évasion d'environ 5 milliards de dinars de recettes fiscales par an), mais également aux consommateurs finaux, privés de garantie et bien souvent contraints à de coûteux flashages pour mettre aux normes algériennes ces appareils programmés pour d'autres réseaux que les nôtres. Ce qui inquiète par-dessus tout les sociétés de téléphonie mobile agréées, c'est de voir tous ces appareils issus de la contrebande et des trafics en tous genres, ostensiblement étalés dans pratiquement toutes les boutiques et marchés algériens de téléphones portables, sans que cela n'interpelle les services de répression des fraudes. Le cas des téléphones mobiles en provenance de Grande-Bretagne, facilement repérables par leur logo «T.Mobile» est, à ce titre, révélateur de leur laxisme à l'égard de ce fléau, pris en charge, nous dit-on, par de véritables réseaux mafieux. Outre les voies terrestres (frontière marocaine) où les passeurs rivalisent en ruses pour mener à bon port leurs livraisons de portables, la voie aérienne est également utilisée en faisant appel, comme c'est le cas pour les «T.Mobile» anglais, aux services des sociétés de colis express installées en Algérie. Au regard du nombre impressionnant de téléphones portables introduits par ces sociétés de courrier rapide, il est fort probable que nos services des douanes ignorent, aujourd'hui encore, l'existence de cette filière de contrebande à laquelle il est pourtant urgent de s'intéresser. Un autre opérateur agréé, également installé à Alger, nous apprend que les téléphones mobiles introduits sur le marché algérien par des contrebandiers organisés ou de simples mais très nombreux «trabendistes» sont généralement empaquetés en vrac, sans leurs cartons d'emballage et sans leurs chargeurs, envoyés séparément. Ce mode d'emballage permet d'introduire à chaque expédition un nombre impressionnant d'appareils venus grossir, chaque année un peu plus, un flux informel estimé à plusieurs centaines de milliers de téléphones portables par an. La concurrence déloyale ainsi créée est, évidemment, de nature à décourager les quelques investisseurs qui avaient projeté de réaliser des unités de production de téléphones mobiles en Algérie. L'un d'entre eux nous a affirmé avoir, pour cette raison, différé la construction de l'usine de montage d'appareils de téléphonie mobile prévue dans le business plan de son entreprise, jusqu'à ce que ce phénomène de contrebande soit, au minimum, réduit à une proportion gérable.