Un enseignant d'université assassiné en pleine salle de cours, un maître de conférences traîné devant les tribunaux comme un vulgaire malfrat parce qu'il s'est tout simplement permis de donner un avis sur la viabilité du système universitaire algérien dans les journaux, des professeurs battus par leurs élèves dans de nombreux lycées sans que personne bouge le petit doigt. Quelle tristesse ! Qui aurait pu penser qu'un jour, notre société tomberait aussi bas et assisterait sans opposer la moindre résistance au viol, à l'humiliation et à l'avilissement du savoir et de ceux qui l'incarnent. La guerre d'usure et sournoise livrée à la raison, à l'effort et au mérite n'est pas un bon présage pour l'avenir de ce pays. Ce n'est pas faire dans la morale que de dire qu'une société sans repères et surtout sans échelle de valeurs ne peut aller loin. Bien évidemment, lorsque des criminels notoires qui ont pillé l'argent du Trésor public ou qui ont un passé d'égorgeur ou de tueur en série trouvent de la compassion et de la compréhension même auprès de l'Etat, il n'y a dès lors plus à s'étonner de voir la société se transformer en jungle et la violence devenir un mode de régulation sociale. Et actuellement, c'est ce qui est en train de se produire. Tout le monde sait qu'en Algérie, il y a des zones de non-droit : des régions entières sont gangrenées par l'informel et, dans certaines wilayas, il arrive que des contrebandiers fassent la loi. Le tout avec pour toile de fond le terrorisme islamiste. Dieu seul sait quoi d'autre encore. Dans ce décor dantesque, tout se vend et tout s'achète. Y compris le savoir. Bien entendu, celui-ci est « acheté » de l'extérieur à coups de devises fortes, comme le reste des marchandises que le pays importe. Cela pourrait d'ailleurs expliquer pourquoi la vie d'un universitaire ne vaut pas cher dans ce pays.