«Vous avez vu le cube», s'exclame Mustapha Nedjaï en accueillant les invités qui se pressent à la réception donnée à l'occasion du vernissage de son exposition. L'œil du visiteur est immédiatement attiré par l'objet translucide qui trône bien en vue au milieu de la salle. «C'est comme un rubicube. Mais j'ai placé une phrase à l'intérieur ‘‘Faites vos je !'' Ça veut dire, arrêtez de voter bêtement !» Direct, l'artiste explique qu'il en a assez et que «le coup de barres» revient comme un leitmotiv par rapport à tout ce qu'a vécu et que vit encore son pays. Son art, il l'utilise pour exprimer son «ras-le-bol». Les exemples s'enchaînent : l'amendement de la nouvelle Constitution, le vote… Autant de raisons qui dictent ses thématiques. «Je réagis par rapport à ce que je vis tout simplement.» Et de poursuivre en parlant de ses «allergies», de celles qu'il a développées dès qu'il est entré à l'Ecole des beaux-arts d'Alger et qui sont à la source même de son inspiration. Disert, l'homme admet qu'il se dévoile facilement et «qu'il préfère faire le contraire de ce qui se fait». Entre les rouges, les noirs et autres variétés de couleur, avec ou sans titre, du «Sas» au «Passage», ses œuvres jalonnent et mènent le visiteur le long d'un chemin abstrait, dont l'expression traduit les fortes pensées du peintre. «Notre société est dans un sas actuellement, il y a les vrais murs et pis encore, ceux qui sont dans nos tête.» Pour l'artiste, même si l'Algérie est plus calme, la subversion a pris un autre visage. «Quand je vois tous ces barrages qui nous compliquent la vie, le coup de barres est là aussi…», rajoute-t-il songeur. Et de convenir que son pays est fait de contradictions et de contrastes et que même s'il y a toujours autant de génie et de créativité, le paradoxe politique prend la place. «Le chemin est encore long pour arriver à une véritable démocratie…» Mais point de fatalisme dans son discours, car, selon lui, malgré la marchandisation des valeurs, «ça ne basculera pas en arrière». Et de conclure : «Reste à espérer que ça n'en restera pas là.» Provocateur Mustapha Nedjaï ? Peut-être. Sincère ? Certainement. Ses coups de barres sont à découvrir à la galerie Mohamed Racim jusqu'au 11 juin. Suite, armûr e, Coups de barres Mustapha Nedjaï Galerie Mohammed Racim 7, avenue Pasteur – Alger