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100 ans pour tuer la contestation
Publié dans El Watan le 11 - 12 - 2009

«Du jour au lendemain, je vais me retrouver à l'université de Bouzaréah alors que je fais mes études depuis trois ans à la fac centrale ! Je ne suis pas d'accord !» Sarah (19 ans) et ses camarades du département d'interprétariat d'Alger n'ont pas envie de quitter leur emblématique université. Pourtant, ils le savent, la décision vient «d'en haut» : le démantèlement de l'université d'Alger, annoncé au Journal officiel fin octobre, va doucement mais sûrement se faire. «Cette restructuration n'apparaît-elle pas comme un pansement sur une jambe de bois ? Penser qu'en découpant l'université, en la fragmentant, on pourrait amortir le poids du nombre, fluidifier les circuits, rapprocher l'université des ‘usagers', c'est se méprendre sur la réalité de l'institution et sur la profondeur de la crise qu'elle traverse.» Aïssa Kadri, professeur en sociologie à l'université de Paris VIII s'interroge sur le nouveau découpage (voir encadré).
Alors que ce 30 décembre, on célèbrera son 100e anniversaire, qu'est donc devenue l'université d'Alger ? «Un dortoir au lieu d'un milieu de savoir et de connaissance», lâche Brahim Brahimi, directeur de l'école de journalisme d'Alger. Exit les grandes protestations étudiantes qui faisaient d'elles, dans les années 1970 et 1980, le cœur de la contestation sociale et politique. Recopier des cours et obtenir le passage à l'année supérieure, est, hélas, le seul objectif de l'étudiant algérien. «Les étudiants se manifestent rarement pour revendiquer leurs droits. Par exemple, dans mon groupe, un seul étudiant sur soixante se soucie des problèmes de ses camarades ! Mais personne ne le suit par crainte de sanctions des enseignants. Ce qui leur importe, ce sont les notes et le passage. Les garçons veulent partir, les filles acheter une voiture et se marier», se désole Sarah. Un constat qui laisse Aïssa Kadri songeur. «L'université a pourtant connu, à partir du coup d'Etat de juin 1965 et jusqu'à la réforme de 1971, une série de grèves et de manifestations dures, rappelle-t-il. Des grèves et manifestations en février 1968, en décembre 1970 et au début de janvier 1971, la police a investi les universités et procédé à l'arrestation de nombreux étudiants.»
Reflet d'une tendance générale à l'étouffement des expressions, la léthargie affichée par les étudiants d'aujourd'hui est d'après certains professeurs, «accentuée par les cours et les discours à sens unique, résultante d'une volonté de limiter la présence de l'université dans les débats sociopolitiques comme ce fut le cas auparavant.» Pour d'autres, «l'université qui ne vise qu'à abrutir ses étudiants avec des cours archaïques». Brahim Brahimi, également professeur en droit de l'information à l'université d'Alger, s'emporte : «La plupart des enseignants n'ont pas les compétences exigées, certains n'ont même pas le bac ! Certains directeurs, à la tête de grands instituts, n'ont même pas fait d'études universitaires, ce qui explique le piètre niveau des enseignants censés former les étudiants. Pis encore, le contenu des programmes est complètement archaïque. Il n'y aucune mise à jour et rien n'est adapté aux différentes mutations que connaissent la société, l'économie, la politique et la technologie dans le pays et ailleurs.
L'étudiant ne peut plus acquérir une ouverture sur le monde et se doter de l'esprit d'initiative.» Le débat en cours est quasiment censuré ou indirectement écarté par le plus délicat des professeurs. «J'ai été moi même censurée en plein cours devant des dizaines d'étudiants, parce que j'ai voulu engager une discussion sur un problème politique. C'est grave quand ça vient d'un enseignant en sciences de l'information et de la communication !», s'insurge Nesrine, 22 ans, étudiante à Alger. Les rencontres étudiantes se font de plus en plus rares. Le hic c'est que même si certains étudiants ont la volonté de changer les choses, rares sont ceux qui passent à l'action. Et les syndicats étudiants, englués dans des luttes de leadership, ne les aident pas. Pour Daho Djerbal, professeur d'histoire à l'université de Bouzaréah, chercheur et directeur de la revue Naqd, il faut chercher dans l'histoire de l'université les origines de cette division idéologique. «Au sortir de l'indépendance, l'université d'Alger était la seule et unique université en Algérie. Après quelques années, à savoir dans les années 1970, cette université a été plus contestatrice que jamais, et c'est l'Union nationale des étudiants algériens (UNEA) qui menait avec l'UGTA la ‘résistance' contre le pouvoir, plus exactement contre le FLN transformé en parti unique à l'époque.
Le Front de libération nationale voulait caporaliser l'organisation estudiantine. Mais la délocalisation des masses d'étudiants du centre d'Alger à sa périphérie, dans les années 1970, visait également l'orientation des étudiants des spécialités sociales et humaines vers les sciences techniques, explique-t-il. En conséquence, une fissure s'est créée à partir de 1975, entre, d'une part, étudiants ‘autonomes' et étudiants proches du pouvoir et, d'autre part, les ‘volontaires de la révolution agraire'.» Ainsi, le comité de volontariat a remplacé l'UNEA. «Dans les années 1980, les grands instituts ont connu le même le sort puisqu'ils furent déportés au Caroubier, à Dély Ibrahim et Bouzaréah. Cette démultiplication des structures universitaires visait à une meilleur gestion administrative sans pour autant augmenter la compétitivité et la qualité. Tous ces paramètres ont engendré un recul net de certains mouvements estudiantins. Durant les années 1980-1990, les organisations estudiantines se sont multipliées avant d'être infiltrées et noyautées par de nouveaux mouvements à l'instar du Mouvement culturel berbère (MCB) et du mouvement islamiste, poursuit-il. A la fin des années 1990 et au début des années 2000, le mouvement étudiant a fini par représenter, à travers la multitude de ses organisations, les seuls intérêts du gouvernement et des partis politiques de la coalition. En conclusion, les étudiants algériens, pour des raisons d'influence politique, de mal vie et de guerre de leadership entre différentes formations estudiantines, ambitionne plus d'intégrer le pouvoir que de le changer.»
Aujourd'hui, la majorité des étudiants ne rêve que de partir étudier ailleurs, plus exactement en Europe pour «bénéficier d'une vraie formation avec les moyens nécessaires, d'enseignants qui n'apprennent pas avec nous et de rencontres, débats et forums», souhaite Sarah. Nesrine, dépitée par la façon dont fonctionne le système universitaire, se dit même «contrainte, dès ma dernière année à l'université, de préparer un dossier pour aller en France». Aïssa Kadri ne s'en étonne pas : «L'attractivité des universités du Nord risque de s'accentuer en aspirant une partie importante des meilleurs des étudiants.»
Une chose est certaine : le grand mythe de l'université n'est plus le même pour ces jeunes gens pour le moins pessimistes, à l'instar d'Abdennour (19 ans), étudiant à la fac centrale : «Nous les étudiants algériens, nous sommes drogués. On sait que quoi qu'on fasse, rien ne changera car il y a des gens beaucoup plus puissants qui décident à notre place.»
|40 000 étudiants par université |
|Par le décret exécutif du 23 août 2003, l'université d'Alger est divisée en trois universités autonomes. Celle de Bouzaréah hébergera la faculté des sciences humaines et sociales, celle des lettres et des langues et l'institut d'archéologie ; celle de de Dély Ibrahim la faculté des sciences économiques, des sciences commerciales et des sciences de gestion, celle des sciences politiques et de l'information et l'institut d'éducation physique et sportive. A l'université d'Alger resteront la faculté de droit, celle de médecine et celle des sciences islamiques. Selon le recteur de cette dernière, Tahar Hadjar, «cette division vise au développement de l'administration et à une meilleure gestion des étudiant dont le nombre est de 130 000 sur Alger, ce qui attribuera 40 000 étudiants par université après le découpage». Que reste-t-il de l'idée de créer des pôles universitaires dans certaines régions d'Algérie ? Pas grand-chose. «La restructuration de l'université d'Alger vise une gestion meilleure des effectifs et des logistiques alors qu'en matière de qualité, aucun changement positif n'a vu le jour, souligne Brahim Ibrahimi. En conclusion, on a tué l'université.»|


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