Le comité de wilaya de l'Association algérienne pour la planification familiale (AAPF) a organisé, hier à l'hôtel Soummam, dans la ville de Boumerdès, une rencontre-débat sur « L'avortement à risque et prévention ». Ce sujet tabou dans la société algérienne a été traité sous ses différents aspects au cours de cette rencontre. Sur le plan médical, les interventions ont été axées sur l'impact et les effets néfastes de l'avortement à risque sur la santé des femmes et de leurs familles. Dans ce sens, le Dr Belguembour, médecin gynécologue et chef de service à l'hôpital de Thenia, a évoqué, lors son intervention, les accidents récurrents survenant lors de l'avortement clandestin pratiqué souvent dans des conditions « non thérapeutiques ». Il s'agit, entre autres, selon lui, de « l'hémorragie qui pourrait être fatale pour la femme et de l'infection, car les outils utilisés ne sont pas stérilisés ». Du point de vue juridique, les différents intervenants, dans le cadre de cette approche, ont été unanimes quant « au vide juridique » existant en la matière et à « l'ambiguïté » qui caractérise les textes de lois relatifs à l'avortement. En effet, le Dr Si Youcef, enseignant à la faculté de droit du centre universitaire de Bouira, a relevé le vide juridique existant dans le cas d'avortement volontaire suite à un inceste avant de se poser la question sur l'identité de l'autorité qui devrait être informée par les médecins avant d'effectuer une opération d'avortement. « Le code pénal actuel oblige, dans ses clauses relatives aux cas d'avortement, les médecins d'informer les autorités avant de procéder à une opération d'avortement. Mais de quelles autorités s'agit-il ? », s'est-il interrogé. Cette question restera posée à la fin de cette rencontre. Les intervenants au cours de ce rendez-vous ont relevé également la confrontation des lois concernant l'interruption légale de la grossesse. Sur ce, les juristes, notent que « le code pénal prévoit une autorisation médicale devant être délivrée par un médecin ordinaire tandis que celui de la santé stipule que « le document en question doit être émis par un gynécologue assermenté ». Les praticiens dans ce domaine ont déploré, également, le fait que la législation algérienne soit moins rigoureuse que la législation française en la matière. « La peine pour un avortement criminel en Algérie est de 1 à 5 ans tandis qu'elle est de 2 à 10 ans en France », ont-ils regretté. Selon eux, une législation sévère « dissuaderait les gens de recourir à l'avortement à risque ». Pour ce qui est des réalités du terrain, des sages-femmes ont fait part des femmes souffrant des séquelles d'avortements clandestins. « Il y en a même celles qui ont tenté de se suicider », ont-elles signalé. Pour rappel, l'AAPF a été créée en 1987 à l'initiative de 72 bénévoles. Elle en compte 3000 aujourd'hui. Depuis 1990, elle est membre de la Fédération internationale pour la planification familiale. Elle œuvre pour « l'amélioration de la qualité de la vie des individus en faisant campagne pour la santé et les droits en matière de sexualité et de reproduction, par le plaidoyer et la prestation de services, plus particulièrement auprès des personnes démunies et vulnérables ». Notons enfin qu'environ 8000 cas d'avortements clandestins ont été recensés en 2007 en Algérie.