–Harmonica est une formation faisant dans l'harmonie, harmonisation… Il y a beaucoup de gens qui croient que le choix de cette dénomination est lié à l'instrument (harmonica). Malheureusement, on ne l'a pas encore intégré dans l'instrumentation. Mais c'est un dérivé de l'harmonie. –Quelle est votre démarche instrumentale ? Notre mission est d'harmoniser la musique du terroir algérien. Que ce soit le chaâbi, le gnawi, le assimi, le hawzi… Et ce, avec de la musique rock, blues… C'est le mode pentatonique. Le gnawi et le blues, c'est le même mode et la même gamme. On peut jouer dessus, sans aucun problème. Faire des improvisations… Alors, cela n'est pas difficile pour nous. -Vous vous sentez investis d'une mission… Oui, la musique qui prime pour nous, c'est la musique traditionnelle et son âme. A l'état brut. Telle qu'elle est. Du terroir. Cette musique est belle. L'harmoniser, pourquoi pas ? -Un habillage harmonieux… Oui, y ajouter des accords, un jeu de basse, une batterie, de la percussion, bongos, congas… l Section cuivre… Bon, on ne travaille pas souvent avec une section-cuivre. Mais il y a le clavier. -Vous êtes claviériste… J'utilise plusieurs sons. Surtout, le son piano. Mais parfois, on y intègre des cuivres. Parce que ce style (d'harmonica) demande des attaques, des solos-cuivre. -C'est énergique… Oui, c'est énergique. Pour le punch. C'est aussi pour le groove, comme on dit. Il y a des morceaux qui sont rythmés. Alors, cela nécessite des sons un peu agressifs. -Harmonica affiche sa différence… On a notre style, notre couleur… C'est algérien. Et chaque membre du groupe a son empreinte. Par exemple le drabki (percussionniste) est de formation chaâbi, moi, je suis influencé par la musique arabo-andalouse. Au piano, je joue un peu occidental, oriental… Donc, on est «métissés». Belkacema fait de la contrebasse au conservatoire d'Alger. Mohand est surtout influencé par le blues et le gnawi. Donc, c'est le lead-chanteur. Chaque membre apporte sa valeur ajoutée. -Souvent, on affuble Harmonica du style gnawi, diwan… Non, non ! Ce que je préfère, c'est que le groupe Harmonica possède son propre style. On fait de la fusion de la musique du terroir algérien, le traditionnel. On pense même à composer un titre en kabyle ou chaoui ! Il s'agit d'harmoniser la musique traditionnelle tout en conservant son esprit. -Les textes des chansons sont anciens, issus du patrimoine… Il y a des chansons qui sont prises du patrimoine national. C'est surtout le diwan, gnawi. Mais la plupart des titres d'Harmonica sont des compositions et des textes signés par les membres du groupe.
-Comment choisissez-vous les textes, les thèmes… ? Le premier album portait sur l'Algérie, le caractère de l'Algérien, ses points positifs… Bon, les points négatifs, on ne les a pas cités. (rires). Peut-être que ce sera sur le 4e album. (rires). On a parlé aussi de la beauté des paysages de l'Algérie (Tassili, le Sahara…), des martyrs de la Révolution… Le deuxième album intitulé Salam portait sur la paix. Peace and love ! Surtout, après les agressions israéliennes contre le Liban et Ghaza. On a été très touchés par ces événements. La musique est un langage universel de paix et de tolérance. On fait aussi quelques titres avec deux chanteuses britanniques, notamment la chanson Khalouni n'aïch. Un titre 100% acoustique. Une ballade. On fait dans le métissage de la musique. Tout ce qui est beau, attractif… -Vous avez l'air «intello» musicalement parlant… (Rires) Hamdoullah (Dieu soit loué). Tout d'abord, je suis ingénieur d'Etat en statistiques et planification. Le niveau intellectuel et la musique vont de pair. Il faut un minimum de savoir et de culture. Sans prétention aucune, sans citer personne, le niveau en Algérie a malheureusement trop baissé. -Vous voulez dire qu'il n'y a plus de création… En matière de créativité et de recherche. Par exemple, je n'ai rien contre la musique raï. Cheb Khaled et Mami ont fait du bon travail. Ils ont exporté le raï. Et là, ce que l'on écoute, c'est autre chose… Une boîte à rythme, le synthétiseur, un percussionniste et un chanteur… Pour moi, ce n'est pas de la musique. On appelle cela le «live». Il n'y a aucune suite d'accord logique. C'est anarchique. Je ne dénigre personne. Il y a des gens dans le raï qui ont un bon niveau. C'est la réalité. Il faut agir, pourquoi pas ? Il faut encourager les formations acoustiques algériennes. -Un label indépendant de promotion… Oui ! Voilà, un label qui encourage les jeunes artistes. Un organisme faisant dans la promotion des jeunes talents. Vous savez, il n'existe pas beaucoup de formations en Algérie. Il ne faut pas se voiler la face. Il n'y a pas assez de concurrence. Une poignée de groupes dans un vaste pays comme l'Algérie. Il y a un potentiel énorme. On a beaucoup de jeunes qui ont du talent. -Vous ne vivez pas de votre art… Malheureusement non. Je travaille dans une société. Je voudrais faire uniquement de la musique. Mais j'ai peur du risque. D'ailleurs, la musique est une histoire de famille. Mon arrière-grand-père est Rachid Ksentini, Allah ya rahmou. Là, j'ai 28 ans, mais comment vais-je faire pour me faire une situation. On a peur, voilà !
-Le 4e album est en gestation… Oui, il l'est. Mais ce ne sera pas neuf mois de période de gestation. Ce sera un peu plus. Horizons 2011-2012, il sera prêt. Harmonica est une formation acoustique. Donc, cela nécessite du temps. Bio express : Le groupe Harmonica a été formé par des jeunes férus de musique algérienne qui se sont constitués en groupe en 1997. En 1999, ils enregistrent leur premier album et connaissent immédiatement un vif succès, ce qui leur valut d'être sollicités pour animer diverses soirées et de participer à de nombreux spectacles dans des festivals de renom à travers le territoire national. Après une période de séparation, le groupe se reconstitue avec des sons nouveaux et de nouveaux visages, pour offrir une musique plus élaborée et davantage harmonieuse. Harmonica revient avec un nouvel album qui porte comme intitulé Salam. Encouragés par le succès des deux albums précédents, les jeunes membres du groupe se sont attelés à la création, toujours dans le genre «fusion afro-méditerranéen» qu'ils ont affectionné, de titres susceptibles de répondre aux goûts de leurs auditeurs devenus de plus en plus exigeants. En procédant au brassage de divers modes puisés dans les musiques du monde avec l'exercice délicat de les intégrer dans notre fonds culturel maghrébin authentique, Harmonica souhaite apporter sa modeste contribution à l'émancipation du patrimoine musical national. Salam, paix, peace ! Le même mot, dans toutes les langues des jeunes du monde, résonne avec la même sensation car dit avec la même sensibilité. Harmonica tente de le dire de la même manière avec un habillage musical pour le rendre encore plus beau. http://www.myspace.com/harmonica