Suite au débat médiatique suscité par le contenu de l'ouvrage de cheikh Khaled Bentounès, le Haut-Conseil islamique (HCI) appelle à l'apaisement et déclare accepter « l'arbitrage » proposé par l'auteur du livre. De même, le HCI « souhaite que soit mis un terme à ce débat tendu entre la zaouïa alawiya et l'Association des oulémas algériens ». Dans un communiqué dont a été destinataire hier la rédaction d'El Watan, les responsables de l'institution tiennent à souligner que toutes les remarques formulées depuis la parution du livre polémique n'avaient été qu'« amicales, après avoir lu l'ouvrage de la zaouïa que celle-ci a fait parvenir avec la dédicace de l'auteur ». Amicales » ne semble pourtant pas être le terme le plus approprié pour décrire le déferlement de critiques ciblant cheikh Khaled Bentounès. Le litige portait, dans un premier temps, sur « la forme » de l'ouvrage, à savoir sa jaquette et quelques illustrations, l'une montrant le portrait de l'Emir Abdelkader entouré d'une étoile de David, les autres des effigies du Prophète et d'autres figures de proue de l'Islam. Ce qui est formellement proscrit par la tradition musulmane, une fetwa d'Al Azhar interdisant la représentation du Prophète, de sa proche famille et de dix de ses compagnons. Pour se défendre, cheikh Bentounès a argué que ces images n'étaient que des miniatures anciennes, perses pour quelques-unes, qui datent de plusieurs siècles. Pour le HCI, ces illustrations « anciennes, sous forme de miniatures et d'images populaires, sont loin d'être fiables. Ce qui est surprenant, c'est que certaines images sont osées ». Le conseil a appelé l'auteur de l'ouvrage à faire amende honorable et à retirer ces images « désapprouvées par la majorité des savants de l'Islam ». Quant à la couverture du livre, elle est jugée « choquante » par le HCI, qui explique que de lier à l'Emir Abdelkader, une éminente personnalité nationale, l'étoile de David est « indécent » tant l'étoile « est devenue symbole du sionisme connu pour son hostilité envers l'Islam ». Pour toute réponse, la zaouïa alawiya a simplement rappelé que cet « emblème » est avant tout le sceau d'un envoyé de Dieu cité dans le Saint Coran. Débat apaisé Puis vinrent des « remarques amicales » concernant le contenu du livre et le message « de tolérance interreligieuse et d'ouverture ». Selon le HCI, ces textes « laissent entendre une unification de toutes les religions et c'est là une thèse étrange qui n'a aucun lien avec l'Islam et qui ne peut être appliquée au vu des différends qui caractérisent les relations entre ces religions », ajoutant que « l'Islam prône le dialogue des religions de manière sereine et sur la base du respect mutuel et des spécificités de chaque religion ». « Ce livre contient 840 références et a demandé beaucoup de travail. J'ai essayé de restituer à notre mémoire la place qui est la sienne puis la transmettre à ceux à qui elle appartient », rétorque cheikh Khaled Bentounès. « C'est une simple énumération des étapes de la propagation de l'Islam avec des emprunts repris à titre d'illustration de cette épopée », affirme quant à lui le porte-parole de la zaouïa alawiya, Nasreddine Mouhoub. Suite à ces échanges par communiqués et interventions dans les médias interposés, le ton des échanges montent d'un cran entre les deux « clans ». « Pour nous, cette campagne ne sert ni l'Islam ni les musulmans, par contre elle tend à entretenir la fitna », déplorent les fidèles de la zaouïa, qui accusent leurs détracteurs de « salafisme ». Les deux parties n'en démordent pas : l'une veut la suppression des éléments litigieux contenus dans le livre et l'autre campe sur leur maintien et leur « islamité ». Cheikh Bentounès en appelle à la médiation et à l'arbitrage des oulémas musulmans. « Nous sommes prêts à poser le problème au niveau de toutes les instances de droit musulman comme l'université d'Al Azhar ou celle des Qaraouiyne », avait-il déclaré. Dans son dernier communiqué, le HCI réagit vivement à « l'allusion aux salafistes ». « Elle ne le concerne pas, le HCI étant connu pour son ouverture d'esprit et son dialogue avec les courants de l'Islam comme avec les autres religions. Mais l'ouverture et la rénovation ne sont le monopole de personne, heureusement », conclut le communiqué.