Les armateurs qui ont bénéficié du soutien de l'Etat pour l'acquisition de navires de pêche viennent de recevoir des mises en demeure du MPRH pour le remboursement des traites contractées auprès de la BADR. Dans 10 jours, ils recevront une dernière avant les poursuites judiciaires. Cette menace est un pas de trop, s'insurgent les armateurs qui ont l'intention de briser l'omerta qui entoure la gestion du plan de relance économique du développement de la pêche et de l'aquaculture. Un gigantesque financement de 9,5 milliards de dinars pour l'acquisition d'une flottille de plus de 400 unités de pêche mais qui a connu les mêmes dérives que son équivalent de l'agriculture, le PNDRA. Une mesure qui pose un certain nombre de questions. D'autant plus que le MPRH s'est toujours défendu d'intervenir dans les transactions financières. Curieux, vraiment curieux… « C'est pratiquement l'ensemble des bénéficiaires du soutien de l'Etat qui sont en cessation de paiement pour des raisons aussi nombreuses que diverses », nous explique-t-on. « Ceux qui ont pu ramener leurs bateaux des chantiers navals, des gens loin de la profession ou des patrons de pêche, sans beaucoup d'instruction, ont été abandonnés à leur sort sans mesures d'accompagnement et ils se sont heurtés aux aléas de la mer et du métier de la pêche. » D'autres, et c'est le plus grave, se sont fait confisqués et saisir leurs bateaux dans les chantiers navals turcs pour être mis en vente. Ils y ont laissés les économies de toute une vie et, avec leur famille, ils vivent de véritables drames sociaux. Les armateurs ne comprennent pas le jeu que joue le MPRH. Comment peut-il menacer des tribunaux alors qu'aucune convention, contrat ou autre arrangement ne le lie aux armateurs ? Comment peut-il se substituer à la BADR qui, au contraire, continue d'assurer pour les bateaux en construction même s'ils ont des problèmes. « Comment peut-il nous demander des comptes alors que ce sont de hauts fonctionnaires de ce ministère qui nous ont orientés vers les chantiers navals de ANA Group et présentés aux dirigeants de cette société. » « Le colossal investissement consenti par l'Etat sur des deniers publics n'a pas trouvé de défendeurs vis-à-vis des constructeurs turcs. Pourquoi n'y a-t-il jamais eu de représentants de l'Etat, des banques et des professionnels pour encadrer la construction de bateaux qui, pour la majorité, se sont avérés défaillants », s'interrogent encore nos interlocuteurs. « Regardez ce qui s'est passé à Annaba. L'ambassadeur de Turquie en personne s'est déplacé sur place pour l'affaire du thon. Il a rencontré le procureur général et les autorités locales pour obtenir la libération de ses concitoyens », rappelle les armateurs pour montrer le rôle que pourrait jouer notre représentation nationale en Turquie s'ils consentaient à contribuer à dénouer la situation sur place. « Et puis pourquoi maintenant, soit trois ans après les faits ? », se demandent encore les promoteurs. Pour eux, il ne fait aucun doute que cette agitation brusque et soudaine est liée à l'affaire de Annaba qui, rappelons-le, concerne l'arraisonnage de thoniers turcs dans les eaux territoriales pour le motif d'assistance aux pêcheurs algériens. « C'est pour donner l'illusion que le MPRH est attaché à la réglementation alors qu'il la bafoue en se substituant à la BADR et que l'autorisation accordée aux Turcs cache en fait qu'un large trafic sur le quota de thon algérien. » Et à propos de l'affaire de Annaba, nous avons appris que celle-ci suit son cours et que de hauts fonctionnaires du MPRH dont le SG, Boudamous Fateh, ont été auditionnés cette semaine par le procureur et le juge d'instruction du tribunal de Annaba. Selon nos sources, l'autorisation de pêcher aurait été donnée aux Turcs par un cadre de ce ministère. Nos tentatives pour avoir des réponses ou des avis du MPRH sont restées vaines. La cellule de communication est en vacances jusqu'à la semaine prochaine.