Le groupe Cevital a ouvert hier la boîte de Pandore. Il a expliqué comment l'équipement EvCon DL 2300 A5 est retenu à Boudouaou depuis juillet dernier. Il donne, dans un communiqué rendu public hier, des détails saisissant d'un litige l'opposant aux services des Douanes et visiblement à la justice aussi. Une chronique judiciaire qui n'a ni queue ni tête mais aux relents d'un véritable sabotage. Un odieux crime économique. C'est une histoire rocambolesque que le groupe Cevital retrace. Une histoire qui met encore à nu deux institutions de l'Etat : les Douanes et la Justice. Elle commence le 9 juillet dernier, quand dans le cadre de son projet d'installation d'une usine de fabrication de membranes à Larbaâ, le groupe Cevital a importé une presse pour plaques sandwich de type DL 2300 A5, déchargée au port sec de Boudouaou. «Les services des Douanes, indique le groupe de l'homme d'affaires Issad Rebrab, avaient jugé utile de recourir à une expertise judiciaire pour déterminer sa valeur ainsi que son état.» Un expert, faut-il le rappeler, a été ainsi désigné le 8 août 2018. «Mais par ignorance de la nature de la machine importée, explique Cevital, l'expert en question a confondu notre presse pour plaques sandwich avec une extrudeuse. Cette erreur de taille a faussé l'ensemble de son rapport.» Le 3 septembre, «le tribunal a désigné un deuxième expert». Sauf qu'à quelques jours de la remise de son rapport, Cevital «a appris que la Douane avait dressé un procès-verbal d'infraction à la législation sur le change en se basant uniquement sur la première expertise erronée». Elle s'est même «précipitée à le transmettre au procureur de la République près le tribunal de Boudouaou sans attendre les conclusions du deuxième expert». «Ce dernier allait pourtant conclure que l'équipement est d'une technologie unique au monde et que sa valeur déclarée est justifiée, non exagérée et acceptable.» Suite à cette deuxième expertise, le groupe Cevital affirme s'être rapproché des services des Douanes «pour demander l'enlèvement de notre marchandise». Les mêmes services ont alors «requis une troisième expertise pour trancher définitivement ce litige». C'est ce qui fut fait le 30 septembre. «Un troisième expert a donc été désigné par le tribunal de Boudouaou.» Il a présenté les mêmes conclusions que le deuxième expert : «La valeur de l'équipement en question est justifiée, étant donné que cette presse est un prototype fabriqué spécialement, spécifiquement et exclusivement pour EvCon Industry, avec une technologie supérieure et des caractéristiques techniques complètement inédites, dont ne dispose aucune autre machine au monde.» Quand la justice et les douanes se télescopent Conforté encore une fois par cette troisième expertise, le groupe Cevital a de nouveau sollicité l'enlèvement de la presse. «Le directeur régional des Douanes de Dar El Beïda nous a alors exprimé sa disposition à nous restituer l'équipement dès que la justice aura rendu une décision dans ce sens», souligne le groupe d'Issad Rebrab. Le même responsable a par ailleurs assuré Cevital que «le procès-verbal d'infraction transmis au procureur de la République serait alors classé sans suite». «Ces mêmes engagements ont été également pris par le receveur des Douanes de Boumerdès.» «Cette décision réclamée par les Douanes a été rendue le 27 novembre 2018 par le tribunal de Boudouaou, qui a ordonné à l'administration des Douanes de Boumerdès, par une formule exécutoire, la libération immédiate et sans condition de notre équipement, sachant qu'il risque, comme l'atteste le fabriquant, de sérieux dommages en cas d'une exposition prolongée aux intempéries», écrit le groupe Cevital dans son communiqué. Mais à son «grand étonnement, ledit receveur a refusé d'exécuter ce jugement et a introduit une demande d'arrêt d'exécution». «Demande qui sera rejetée par le tribunal le 13 décembre 2018, confirmant ainsi la décision de justice exécutoire rendue auparavant en notre faveur», précise le groupe Cevital, qui «le même jour, s'est présenté avec cette nouvelle décision de justice aux services des Douanes de Boumerdès». Ces derniers ont dit être «prêts à l'appliquer et ont donné rendez-vous à Cevital pour le dimanche 16 décembre 2018 pour l'enlèvement de sa marchandise». Les responsables du groupe, comme prévu, se sont alors présentés dimanche dernier au port sec de Boudouaou «pour procéder aux formalités d'enlèvement» de leur équipement. Encore une fois, et «contre toute attente», les services des Douanes sur place leur ont signifié «l'impossibilité d'exécuter le jugement en raison d'une décision de rétention du matériel qui venait d'être transmise par le juge d'instruction près le tribunal de Boudouaou». «Cette procédure a été enclenchée sur la base du procès-verbal d'infraction à la législation sur le change, établi suite à une première expertise superficielle, imprécise et réalisée sans consultation par l'expert de la fiche technique de la machine», dénonce Cevital. Incroyable retournement. Le tribunal de Boudouaou avait pourtant «écarté dans son jugement exécutoire du 27 novembre 2018 cette expertise et n'avait retenu que les deux contre-expertises favorables à EvCon Industry». La décision du juge d'instruction du 16 décembre 2018, portant sur une nouvelle mesure de rétention de la machine, est tombée tel un couperet. C'est à ne rien comprendre !