J+2 pour ce 26e Festival international de Timgad. Au menu du vendredi, une confrontation musicale, mais néanmoins amicale entre beauté du rif marocain et fugacité d'as de la salsa cubaine. Jiljilana, grand cru de musique « parlante » marocaine, 21 ans d'âge et pas une ride ni altération de la voix. Un quintette de charme aux accents suaves et au verbe empli de morale et de conseils. Car là est le secret de Jiljilana. « Nous faisons une musique qui s'écoute avec l'oreille et non avec le pied », aurait affirmé le leader de ce groupe. La musique, bien qu'entraînante, n'est que l'écrin de contes et poèmes profonds et sensés. Le public, grand absent de la soirée, n'a pu fusionner avec tant de « hikma » et n'a, pour ainsi dire, que peu communier avec le groupe. Il est de ces musiques qu'on ne peut « sentir » que dans l'ambiance d'un mariage tzigan ou dans le feu d'un concert. La performance du groupe d'Alfredo Rodriguez, avant-hier en deuxième partie de soirée, en était bien proche. Un bandana blanc fiché sur le crâne, une peau tannée par le soleil et buriné par l'âge, Alfredo Rodiguez est au clavier ce qu'est Ibrahim Ferres au piano, un virtuose. Il aurait d'ailleurs pu, lui aussi, faire partie du Buena Vista Social Club, s'il n'était pas à l'instar de ses collègues, exilé en France, fuyant la dictature. « C'est paradoxal, mais nous n'avons jamais joué à Cuba », soulignait, les yeux humides, Luiz, bassiste du groupe. Musicalement, Alfredo Rodriguez et son groupe surfent sur la tendance ethno-jazz, mais pour l'occasion, ils ont tous mis de l'eau dans leur... rhum, en jouant une musique plus « touristique », afin de séduire un public de marbre qui se sentait, peut-être, étranger à cette culture latine. Salsa, mambo, paso-doble, cha-cha-cha et son ont été joués avec brio par les membres du groupe, mieux ce sont les chansons célèbres qui ont été reprises. Guantanamera, Che Guevara... sans oublier l'hommage rendu par Alfredo à Compay Segundo, à travers une reprise, très stylisée, de Chan-Chan. Soudain, un caillou est jeté sur la scène, le groupe continue à jouer impassiblement, ses membres reviendront sur l'incident en affirmant : « Ce n'est pas un caillou qui nous fera détester l'Algérie. » Demain, ils seront à Alger. Bueno fortuna...