Le tribunal de Koléa, selon le document référencié n°09/2005 établi le 8 janvier dernier, a notifié la mise sous contrôle judiciaire des nommés Abdellah Farsaoui âgé de 45 ans et Laïd Berradi 43 ans. Ils sont inculpés pour « escroquerie, faux témoignage, trafic d'influence et fausses déclarations ». Des documents les accusant ont été remis à notre rédaction. Ils attestent que les deux personnes mises sous contrôle judiciaire ont bénéficié de l'aide de responsables employés avec la complicité des institutions de la République à l'échelle locale. Le silence observé autour de cette affaire, qui a du mal à connaître son épilogue depuis son éclatement vers la fin de l'année 2004, a surpris beaucoup de monde, au moment où il est question, en Algérie, de faire cesser le laxisme et les passe-droits, pour instaurer l'autorité de l'Etat et une justice équitable. Contactés par nos soins, des responsables de la BADR confirment l'émission de chèques sans provision, d'un montant global qui avoisine les 60 millions de dinars. Les victimes ont naturellement déposé des plaintes, pour récupérer leur argent par le biais de la justice. Cependant, selon les premiers éléments de l'enquête, le nommé Laïd Berradi a obtenu « une attestation de perte de son chéquier », établie par la police en date du 3 janvier 2005, sous la référence n°10/SDK/2005. Ce document ne devait pas être établi par le service de la police judiciaire du commissariat. Laïd Berradi, un habitué, a trouvé une formule grâce aux précieuses idées de ses « conseillers » pour tenter d'échapper à la justice. Il a présenté au commissariat de police de Koléa un de ses anciens ouvriers, Abdellah Farsaoui, un repris de justice qui vit dans un profond dénuement. Selon le scénario préparé par le groupe, Laïd a promis une enveloppe de 50 millions de dinars ainsi qu'un logement de type F3 et enfin le paiement des frais de son mariage pour se préter au scénario suivant : « Devant le juge, lui aurait-on dit, tu maintiendras ce témoignage. Tu passeras juste quelques jours en prison. C'est l'unique chance de ta vie qui se présente. Tu as déjà remarqué que nous avons de notre côté le procureur de la République, les juges et le commissaire », lui a-t-on précisé. Le mécanisme a aussitôt été mis en branle afin de sauver la tête du « milliardaire » Laïd Berradi. Après avoir passé quelques heures en garde à vue à la cellule du commissariat de Koléa, Farsaoui le bouc émissaire se ravise. « Je voulais avoir la conscience tranquille », dit-il. Il fait appel à l'officier de la sûreté nationale, chef de service de la police judiciaire à Koléa, M. Djillali E. Ce dernier s'est révélé être le grain de sable de cette grotesque machination. En accomplissant sa mission conformément aux orientations de la DGSN, il a mis à nu le pot aux roses. Son intégrité et son opiniâtreté ont fait échouer le scénario. Il a même décliné une proposition alléchante. Cet officier de police est au crépuscule de sa carrière. Ses compétences et sa franchise dérangent beaucoup de gens adeptes du gain facile par tous les moyens. Il a saisi sa tutelle de ce dossier en date du 16 janvier 2005, selon des sources sûres de la wilaya de Tipaza. Il s'inquiète du silence entretenu par cette grave affaire, d'une part et d'autre part, de la lenteur dans son traitement au niveau du tribunal de Koléa. Cet officier de police avait utilisé intelligemment le temps en 1er lieu et les moyens techniques en 2e lieu pour arriver à prouver que Laïd Berradi est un individu très influent qui arrive, grâce à sa domination sur certains commis de l'Etat, à exiger des décisions à sa convenance, quitte à user de subterfuges. En dépit de son faible niveau scolaire, Laïd Berradi s'est retrouvé à la tête d'une fortune évaluée à plusieurs dizaines de millions de dinars, constituée en un temps record. C'est la conjugaison de l'omerta et le diktat de l'argent mal acquis qui continuent à régner dans cette partie de la wilaya de Tipaza. Malgré la publication de plusieurs articles dans la presse écrite indépendante francophone, qui avaient étalé au grand jour les malversations de Laïd Berradi, celui-ci possède assez de ressources pour soudoyer des complices qui le font bénéficier d'une incroyable impunité. Même les décisions prises à son encontre ne sont, en réalité, que des leurres, tout juste pour justifier la présence des institutions. Le nommé Farsaoui, qui craignait d'être assassiné à tout moment, a enregistré ses aveux sur une cassette vidéo très révélatrice. Le chef de service de la police judiciaire de la sûreté nationale qui a su dévoiler les dessous de cette affaire, attend l'arrivée de la police des polices de la DGSN pour éviter les représailles locales. Selon notre source, la commission chargée de sévir contre la corruption installée au niveau du ministère de la Justice a été destinataire de la cassette vidéo en question et d'autres documents . Interrogés par nos soins sur l'ampleur des pratiques mafieuses utilisées en toute impunité à Koléa en particulier, certains responsables au niveau de la wilaya de Tipaza, se sont contentés de nous répondre : « Les décisions devront être prises à partir d'Alger. Cela prendra un peu de temps », disent-ils.