Le Parlement iranien a continué, hier, à examiner les candidatures des ministres proposés pour entrer au gouvernement, dont celles des femmes, qui suscitent déjà de vives critiques de la part de certains députés conservateurs qui s'interrogent sur leurs compétences. Les députés ont discuté de la candidature de Soussan Keshavarz, pressentie pour le ministère de l'Education. Elle fait partie des trois femmes choisies par le président Mahmoud Ahmadinejad pour faire partie de son gouvernement comportant 21 ministres. Marzieh Vahid Dastjerdi et Fatemeh Ajorlou ont également été proposées pour les ministères de la Santé et de la Sécurité sociale. « Que se passe-t-il pour qu'au lieu de choisir des gens compétents et forts à la tête des ministères, on propose des gens qui n'ont pas le niveau ? », s'est indigné Ali Abbaspour, président de la commission de l'éducation au Parlement à propos de Mme Keshavarz. « Si à la demande du président, on vote la confiance, nous serons obligés de voter ensuite une motion de défiance. Nous avons besoin de ministres forts. Ce n'est pas une question de sexe. Si le président propose des ministres forts, quand bien même il s'agit de femmes, les hommes rentreront à la maison. Il n'y a pas de problème », a-t-il assuré. L'intervention de M. Abbaspour laisse en principe peu de chance pour qu'elle puisse obtenir la confiance du Parlement. Répondant aux critiques, Mme Keshavarz a expliqué qu'elle avait été élevée dans une famille religieuse et avait participé aux manifestations lors de la révolution islamique de 1979. Des religieux conservateurs sont intervenus ces derniers jours pour dénoncer l'arrivée de femmes au gouvernement, ce qui constituerait une première dans l'histoire de la République islamique. « L'Islam respecte les femmes. Mais cela ne veut pas dire qu'on doit leur laisser des positions sociales importantes », a ainsi estimé dimanche l'ayatollah Ahmad Khatami, un religieux conservateur qui dirige les prières du vendredi à Téhéran. Les députés sont également divisés sur le ministre des Renseignements, Heydar Moslehi. Ce dernier a affirmé qu'il fallait faire face aux « menaces » et aux « complots des ennemis ». Auparavant, le député Jamshid Ansari s'était inquiété des « changements » au sein du ministère et affirmé que M. Moslehi n'avait « pas suffisamment d'expérience ». M. Moslehi a été représentant du guide suprême auprès des Gardiens de la révolution et le corps des bassidji (milice islamique) qui ont joué un rôle important lors des récentes manifestations contre M. Ahmadinejad. « Son expérience au sein du bassidj lui permet d'utiliser des gens purs », avait assuré pour sa défense le député conservateur Alireza Zakani. Les parlementaires doivent examiner lundi les cas de 10 des 21 ministres proposés. Le réformateur Mostafa Kavakebian a critiqué pour sa part le ministre sortant des Affaires étrangères, Manouchehr Mottaki, reconduit à ce poste, notamment pour « les discussions inutiles sur l'Holocauste ». Il a aussi déploré l'isolement croissant de l'Iran sur la scène internationale et l'aide financière à des pays comme la Gambie, la Zambie, la Bolivie, se demandant ce que « ces pays pouvaient apporter de bon à l'économie du pays ». Lors des débats, dimanche dernier, le président Ahmadinejad avait demandé un vote fort pour ses ministres. Mais des ténors conservateurs ont critiqué les choix du président, le manque de compétence des ministres proposés et l'absence de consultation avec les députés. Ces critiques interviennent alors que la victoire du président Ahmadinejad, lors de la présidentielle du 12 juin, est toujours contestée par l'opposition. « Les généraux du Parlement contre les ministres d'Ahmadinejad », titrait hier en Une le quotidien réformateur Sarmayeh.