– Vous venez d'annoncer votre décision de relancer le RPN. Quelles sont les raisons qui vous incitent à le faire ? Le 5 octobre 1988, la jeunesse algérienne s'est soulevée. Elle ne savait pas exactement ce qu'elle voulait. Mais elle savait exactement ce qu'elle ne voulait plus, c'est-à-dire le système du passé. Paradoxalement, Boudiaf est un homme du passé. Mais parce qu'il envisageait toujours l'avenir, un avenir fait de justice et de prospérité partagée, il a été rapidement adopté par le peuple et, mieux encore, il a été qualifié «d'espoir». Il a donc proposé le RPN pour ouvrir la voie à une rupture avec le système, les pratiques et les hommes du passé. Ce projet de société a été bien accueilli par la jeunesse de 1992. La jeunesse actuelle suit avec beaucoup d'intérêt le printemps arabe, c'est-à-dire le vent qui a soufflé pour apporter le changement. Quelle est l'adresse politique actuelle en Algérie qui pourrait proposer en douceur la rupture pour un réel changement ? Si vous la connaissez, donnez-la moi et je serai le premier à la soutenir. Si vous n'en connaissez pas, je vous propose le RPN. Un RPN revisité, débattu par la société civile autour d'un mot d'ordre : «L'Algérie avant tout.» – Pourquoi relancer le RPN et non pas le Parti radical socialiste (PRS) ? Pourquoi relancer le RPN et non le PRS. La réponse est simple : le PRS a été dissous par Mohamed Boudiaf parce qu'il ne répondait plus aux objectifs pour lesquels il avait été créé. Quant au RPN, il faut d'abord rappeler qu'il a été conçu comme un contre-pouvoir. Il a été lancé pour rassembler la majorité silencieuse qui a beaucoup à dire, à faire, mais qui n'a pas trouvé l'espace qu'elle estime convenable pour s'exprimer en vue de permettre aux lumières de jaillir pour combattre les ténèbres dans lesquelles le système a essayé de maintenir le peuple. Boudiaf a été assassiné 21 jours après avoir lancé le projet du RPN. Il n'a pas été assassiné pour avoir dissous le PRS. – Avez-vous préparé une plateforme portant relance du RPN ? De quelle obédience sera le RPN version Nacer Boudiaf ? La plateforme du RPN existe. Je l'ai reprise et fidèlement retranscrite dans mon livre Boudiaf, l'Algérie avant tout. C'est à la jeunesse de débattre de cette plateforme et de préparer le lancement de ce projet de société. Lisez le livre et vous verrez de quelle obédience sera le RPN. – Reposez-vous sur une base sur laquelle vous pouvez compter ? Sur quelle base Ben Boulaïd, Boudiaf, Ben M'hidi et Didouche reposaient-ils ? Le système verrouillé actuel est-il plus dur que le colonialisme ? Boudiaf était décidé à faire «Novembre» même avec les singes de la Chiffa. La jeunesse algérienne qui suit le printemps arabe est décidée à créer le changement. Le RPN leur est offert. – Le ministère de l'Intérieur n'a pas délivré d'agrément à de nouveaux partis politiques depuis 1999. De Zerhouni à Ould Kablia, différentes raisons sont avancées pour cela. En plus, la nouvelle loi sur les partis politiques n'a pas encore vu le jour. Comment comptez-vous mener votre activité politique dans ce climat sclérosé ? Votre question, à mon sens, trouvera sa réponse dans cette citation de Winston Churchill qui a dit : «La civilisation signifie une société reposant sur l'opinion des civils. Elle veut dire que la violence, la loi des guerriers et des chefs despotes, les conditions des camps et de la guerre, de la révolte et de la tyrannie, cèdent la place aux Parlements où des lois sont élaborées et aux cours de justice indépendantes dans lesquelles, pendant longtemps, ces lois sont maintenues.» Quant à Edmund Burke, il a fait cette citation : «Un Etat qui n'a pas les moyens d'effectuer des changements n'a pas les moyens de se maintenir.» – Pensez-vous que les militants y adhéreront parce que le RPN a été créé par le défunt Mohamed Boudiaf ou parce qu'il sera véritablement porteur d'un projet de société, comme vous l'avez affirmé à Béjaïa ? Les militants y adhéreront parce qu'ils trouveront des réponses à leurs aspirations et parce qu'ils contribueront à tracer les contours de ce projet de société.