“Le pouvoir a de l'argent mais pas de projet. Nous, on a un projet. Il faut un début à tout. Car j'ai mal de voir l'Algérie dans cette situation. C'est pour cela que j'ai décidé de faire de la politique”, a lancé le fils du président assassiné. Nacer Boudiaf est sur les traces de son illustre père. Tout en poursuivant sa quête de vérité sur l'assassinat de son père un certain 29 juin 1992, il compte reprendre le flambeau et se lancer dans la politique. C'est à Béjaïa, à l'occasion du Café littéraire organisé autour de son livre, Boudiaf, l'Algérie avant tout ! qu'il a fait cette annonce. Déclaration qui a manifestement surpris son auditoire, venu entendre des révélations mais aussi trouver des réponses à leurs interrogations. Quant à savoir comment il compte faire son entrée en politique, Nacer Boudiaf semble y avoir réfléchi. Tout a été presque synchronisé : de l'idée du livre, de sa date de publication jusqu'à cette annonce. Il a choisi la Kabylie pour abattre ses cartes. Et ce n'est pas du tout anodin. “Est-ce que le collectif Mohamed-Boudiaf, très actif sur le réseau social facebook, compte passer à l'action ?” s'est interrogée une amie virtuelle de Nacer Boudiaf. Comme s'il n'attendait que la question pour se lancer, il répond sans hésiter : “Oui, je veux reprendre le flambeau.” Comment ? En relançant le projet de société cher à Si Tayeb El-Watani, lequel projet passe par la réanimation du RPN, le Rassemblement patriotique national. Son argumentaire ? Dix-neuf ans après le lâche assassinat de son père, l'espoir suscité par Mohamed Boudiaf dans l'âme des Algériens est resté intact. Ceci pour dire qu'il est possible de réussir cette rupture à laquelle tenait Si Tayeb El-Watani. Aux questions persistantes de militants politiques en déshérence, les réponses de Nacer Boudiaf l'étaient tout autant : “Si vous voulez qu'on relance le RPN, moi je suis prêt. Est-ce qu'on peut rassembler tout le monde ? Pourquoi pas. Tout est bloqué. La majorité des partis politiques est sans projet de société. Le pouvoir a de l'argent mais pas de projet. Nous, on a un projet. Il faut un début à tout. Car j'ai mal de voir l'Algérie dans cette situation. C'est pour cela que j'ai décidé de faire de la politique.” Occasion pour lui de dire que c'est la création du RPN, qui a dérangé l'establishment et c'est cela qui lui a valu le coup de rafale dans le dos, le 29 juin 1992 au centre culturel d'Annaba. Le président Boudiaf avait voulu refaire le même coup en créant comme en 1954 le Crua (Comité révolutionnaire d'unité et d'action). Et ce sont les neuf résistants historiques du Crua, qui ont déclenché la guerre d'Indépendance de l'Algérie. Il s'agit pour mémoire de Hocine Aït Ahmed, Ahmed Ben Bella, Krim Belkacem, Mostefa Ben Boulaïd, Larbi Ben M'hidi, Rabah Bitat, Mohamed Boudiaf, Didouche Mourad et Mohamed Khider. L'une des premières décisions du comité, le découpage de l'Algérie en cinq zones. Et sur un ton un peu plus personnel : 19 ans après l'assassinat de Boudiaf avez-vous fait votre deuil ? “Non, le deuil n'a pas été fait. Il faut d'abord connaître la vérité. Je ne crois pas du tout à cette théorie d'acte isolé”. Pour lui, le message des assassins est simple : “Nous l'exécutons devant la caméra de la télévision en direct et personne ne sous touchera au royaume de l'impunité. Rien de crédible ne peut être bâti sans la justice. L'absence de justice laisse la voie grande ouverte à l'impunité dont souffrent les milliers de jeunes, qui ne rêvent que de quitter un aussi beau pays que l'Algérie.” Sur la Fondation Mohamed-Boudiaf, le conférencier a tenu à déclarer à l'assistance qu'il n'a jamais fait partie de cette “fondation alibi”. Pour lui, elle ne travaille que les 16 janvier et les 29 juin. Elle ne mène aucun combat pour qu'éclate la vérité sur l'assassinat de celui dont ils sont censés honorer et défendre la mémoire.