La tension qui s'exerce sur le ciment et les pratiques frauduleuses qui émaillent les transactions sur le marché des matériaux de construction ne semblent pas près de disparaître. En effet, toutes les mesures préventives et de lutte contre la spéculation, entreprises par les pouvoirs publics, n'ont donné aucun résultat sur le terrain, à en croire des professionnels du bâtiment et des travaux publics qui subissent encore le diktat des prix élevés, notamment sur le ciment. A Bouira, où l'on compte l'une des plus importantes cimenteries du nord du pays, celle de Sour El Ghozlane, le ciment continue à se vendre dans les circuits informels à pas moins de 900 DA/q. Pourtant, du côté de la cimenterie en question, les responsables, qui disent avoir entrepris des mesures de lutte contre la spéculation, en partenariat avec la direction de la concurrence et des prix de la wilaya (DCP), se félicitent des résultats de cette opération. Ceux de la DCP aussi, puisqu'à ce niveau, l'on ne manque pas de brandir comme un trophée les dizaines d'opérateurs – spéculateurs – « mis hors d'état de nuire » depuis que des brigades de contrôle spécialisé chargées exclusivement du circuit ciment ont été mises en place, l'année dernière. Selon des sources proches du dossier, plus de 200 cas de fraude ont été relevés. Il s'agit d'opérateurs qui s'approvisionnent à partir de l'ERCC de Sour El Ghozlane, mais qui opèrent pratiquement dans plusieurs wilayas du pays. Une dizaine selon nos sources, dont M'sila, Djelfa, Ghardaïa et jusqu'à Tamanrasset. La première mesure est la traduction des concernés devant la juridiction compétente, ensuite la limitation des quotas de livraison de ciment tout en y associant les autres services administratifs à même de permettre l'évaluation des besoins de chacun. Une mesure qui demeure pour le moins aléatoire, puisque, selon certaines sources, cela dépend des opérateurs et de leurs rapports privilégiés avec les administrations concernées. Pour ce qui est de l'effort de lutte contre le marché parallèle, les services de la DCP ont, récemment, mis la main sur une énorme quantité (près de 3000 tonnes) de ciment destinée à l'écoulement dans les circuits informels. Selon nos sources, il s'agit, pour la plupart, d'entrepreneurs et de producteurs de matériaux de construction à base de ciment qui, au lieu d'utiliser ce matériau dans leurs chantiers et/ou fabriques, préfèrent l'écouler sur le marché à des prix élevés. Ainsi, explique-t-on, ce regain de spéculation sur le ciment n'est pas le fruit de la rareté, mais plutôt de pratiques frauduleuses qui trouvent leurs racines dans le manque de régulation du marché et les passe-droits qui minent souvent les administrations compétentes.