Un hommage a été rendu, mercredi dernier, à Akli Yahiatène qui s'est produit à la salle El Mougar. L'Orchestre symphonique national, dirigé par Rachid Saouli, a accompagné le chanteur septuagénaire avec une armada de musiciens qui se serraient presque sur une scène trop exiguë. L'orchestre et sa chorale de jeunes voix devaient rejoindre hier la maison de la culture Mouloud-Mameri, à Tizi Ouzou, pour le même hommage à un homme resté le même. La voix de cet homme, sur lequel le temps n'a guère de prise, est restée la même ; toujours chaude. Du haut de ses 77 ans, Akli Yahiatène est resté égal à lui-même malgré le passage des ans. « Ceux qui sont morts ne reviendront plus jamais, mais nous, nous ne voulons pas mourir et vous quitter » dira, débonnaire, l'enfant d'Ath Mendas, à Boghni (Tizi Ouzou), sous les acclamations du public venu nombreux à la salle d'Alger-centre où ils ont attendu avec trépidation l'apparition de leur idole. Akli Yahiatène entamera la soirée, période ramadhanesque oblige, avec l'invocation du Prophète Mohamed dans Seliou Af errsul Muhamed, chanson empreinte de mots tout simples qui rappellent cette foi inébranlable qui imprègne les poèmes de Si Muh Umhand, aède au long cours qui a inspiré des musiciens ayant entamé une carrière difficile en France, « terre d'accueil » de plusieurs Algériens qui se rencontraient dans les cafés-maures du vieux Paris. Thamourthiw thamourth idhourar (ô mon pays, pays de montagnes) permettra au chanteur de faire un retour dans la terre des ancêtres à laquelle il reste attaché malgré les départs incessants. Le thème de l'exil est récurrent dans le répertoire de plusieurs chanteurs qui n'avaient pu revenir au pays au lendemain de son indépendance. L'exil est devenu, pour beaucoup, surtout ceux qui s'opposaient au régime en place, cette compagne de tous les jours ; difficile pour eux de s'en séparer. Comme beaucoup de ses contemporains, Akli Yahiatène fut contraint de partir en France où il fera tôt la connaissance d'artistes qui s'y sont installés là depuis plusieurs années : Zerrouk Allaoua, Slimane Azem, Cheikh El Hasnaoui, mais surtout l'incontournable chef d'orchestre, le Casbadji Amraoui Missoum, furent ses compagnons d'infortune avec qui il partagera les seuls espaces qui s'offraient à eux, les cafés chantants des années 1940. Les activités de Akli Yahiatène au sein de la Fédération de France du FLN lui valurent beaucoup de tracasseries et plusieurs séjours en prison. De ces moments difficiles naîtront des chansons, la plus connue est El Menfi (l'exilé), chant composé par les insurgés au lendemain de l'insurrection de 1871.