Le sinistre du mois d'août 2008 a réduit à néant tout un patrimoine ancestral. Certaines variétés ont complètement disparu des champs. Sur les versants des collines autant que sur les buttes de Béni Maouche ouvertes aux quatre vents, l'image de verger de figuiers défiant le temps et ployant, une saison durant, sous le poids des baies chamarrées, appartient désormais à une ère révolue. Dans cette commune rurale, fief de la figue s'il en est, les paysans n'ont d'yeux que pour ce produit du terroir. Le combat épique mené stoïquement durant des lustres contre les vicissitudes du climat a été annihilé par le désastreux brasier du mois d'août 2008. « C'est le coup de grâce. Des efforts de toute une vie réduits à néant en l'espace de quelques heures seulement », se souvient, épouvanté, Slimane, du village Aït Adjissa. « C'est un patrimoine ancestral qui est partie intégrante de l'identité culturelle de notre région. Avec sa destruction, c'est un pan de notre histoire qui s'en va », ajoute-t-il, amer. A Béni Maouche, sans doute plus qu'ailleurs, on entrevoit avec amertume les lendemains qui déchantent. Et l'on s'apprête à faire douloureusement le deuil d'un patrimoine avec lequel on a vécu depuis des temps immémoriaux. « En quelques années, ma récolte a chuté de près de 70%. J'ai perdu en quantité mais aussi en qualité », constate Idir, du village Aguemoune. « Il y a même des variétés de figues qui ont complètement disparu des champs. A ce rythme, c'est toute la filière qui est menacée d'extinction à plus ou moins long terme », conjecture-t-il. Conséquence de l'indigence de l'offre de ce fruit de saison, les prix des premières récoltes livrées sur les plateaux de la vallée de la Soummam culminent à 200 dinars le kilo. Le sort est ainsi jeté sur un été terni par la cherté de ce fruit suave, qui doit désormais figurer comme une plus value. Aussi longtemps que durera le temps des vaches maigres, la figue demeurera le chaînon manquant de la chaîne alimentaire saine. « C'est insensé de laisser dépérir un trésor pareil, à l'heure où les défis imposent d'aller vers l'autosuffisance alimentaire », déplore un autre paysan de Trouna, chef lieu communal de Beni Maouche, estimant que seule l'intervention de l'Etat est en mesure de rendre à cette filière son lustre d'antan.