Six mois d'emprisonnement pour création d'un lieu de débauche pour une accusée qui a bénéficié d'une remise de peine. Ce doit être le trottoir qui a pétrifié tout sentiment chez B. Houaria, 39 ans, dont le visage exprime l'incrédulité et le regard la concupiscence. Elle devait répondre devant la cour d'appel, le 17 août dernier, du chef d'accusation de création d'un lieu de débauche. Pour la circonstance, elle a drapé son corps gras dans une djellaba et emmitouflé sa tête dans un foulard laissant apparaître des cheveux couleur fauve. Son front bas perlé de sueur surmonte des yeux de furet et elle a de grands demi-cercles de transpiration sous les bras. En écoutant les faits relatés par le président du tribunal, la prévenue ne cesse de se trémousser, sans aucune gêne, en s'escrimant avec le nœud de son foulard. Son attitude donne l'impression qu'elle est d'une solidité à toute épreuve. Selon les faits consignés dans l'arrêt de renvoi, les éléments de la police judiciaire de la sûreté urbaine territorialement compétente ont opéré une « descente », au cours de la première semaine du mois de mai dernier, dans le domicile de cette ex-femme de ménage, sis dans un immeuble de la cité Usto, à la périphérie est d'Oran. Les deux couples illégitimes ayant été surpris sur les lieux, ont étayé les dénonciations de ses colocataires, qui ont été notifiées quelques heures plus tôt sur la main courante. « Je n'ai jamais dérangé personne et je me demande pourquoi mes voisins spéculent sur ma vie privée. Les commérages sont pour eux une occupation dont ils se délectent. Je suis libre de recevoir qui je veux chez moi, je présume ? » glapit-elle avec une note de nervosité dans sa voix rauque, qui interloque les membres de la cour d'appel. « Les gens qui ont été surpris chez vous n'étaient pas vos invités, c'étaient plutôt vos clients », fait remarquer le magistrat quelque peu décontenancé. Le représentant du ministère public a requis le maintien de la peine initiale prononcée en première instance par le tribunal correctionnel de la cité Djamel. Notons que B. Houaria avait été condamnée à 18 mois de prison ferme à l'issue de son premier procès. Son avocat a plaidé les circonstances atténuantes. Après délibérations, l'accusée a bénéficié d'une remise de peine, écopant de six mois d'emprisonnement. A l'annonce du verdict, ses petits yeux ont pétillé d'une bonne humeur grivoise et un sourire a marqué ses lèvres minces.