Alors que Paris et Lisbonne accueillaient dernièrement leur traditionnel défilé pour la collection automne-hiver 2011-2012, Lagos mettait également la mode à l'honneur à l'occasion de la Fashion week. Cet événement, dédié à la mode dans toute son ampleur a regroupé cinquante-deux créateurs africains parmi lesquels une vingtaine de Nigérians. La mode nigériane est, selon certains spécialistes dans le domaine, en plein essor économique. La Fashion week de Lagos est un rendez-vous incontournable pour s'y montrer certes, mais aussi pour découvrir les dernières collections, signées par des stylistes célèbres et d'autres en herbe. Parmi cette nouvelle génération, figurent des jeunes, âgés à peine de trente ans, dont, entre autres, Autumn Adeigbo, Bridget Awosika. A ce propos, Carmen Ohen, collaboratrice du site féminin en ligne, Bella Naija, estime que ce sont des jeunes qui n'ont rien à envier aux grands noms de la haute couture mondiale : «Ils affichent tous une modernité avec une identité bien locale. Ce qui se passe est inédit. Il y a cinq ans, il n'y avait que la maison Tiffany Amber, mais elle a ouvert la voie. Je crois que la crise économique en Europe a aussi aidé à faire revenir au pays de nombreux designers, éclectiques et originaux. Regardez sur les podiums», explique-t-elle. Kiki Kamanu réinvente un Mondrian afro, version prêt-à-porter, décliné en orange, bleu, blanc et noir. Mélange de soie et de jupe en pagne à frou-frou évocation des 60's-Black Power pour la maison Viv La resistance. Pour sa part, Nikki Khiran opte pour une garde-robe plus classique. Il joue à outrance la partition des longues robes de soie flamboyantes et aériennes. De son côté, la créatrice, Ituen Basi, donne au bazin Yoruba (aso-oke) une allure résolument classieuse-trash, avec ses mannequins harnachés de casque de motos. Jewel by Lisa et Toju Foyeh ont fait sensation en dévoilant des silhouettes simples et ultra-féminines. Il est à noter que la plupart des stylistes qui ont défilé n'ont pas de boutique, mais détiennent, à coup sûr, une clientèle via le bouche-à-oreille, contractant l'essor d'une classe moyenne. «C'est notre style, notre culture, alors oui, moi j'achète», confie Keisha Gitari. «Bien sûr, ce n'est pas encore accessible à tout le monde, mais quand on est capable de mettre des millions de nairas pour un vêtement Prada, pourquoi ne pas acheter chez des créateurs locaux ? C'est unique, et en plus c'est chic», confie une modeuse. La directrice créative de la maison Farrah, Fatima Aliyu Garba, s'étonnerait presque de sa soudaine réussite. «Quand j'ai commencé il y a six ans, on ne pensait même pas au profit, mais aujourd'hui ça va mieux, je me paye», s'amuse-t-elle. Ancien mannequin devenue créatrice il y a deux ans, Kiki Kamanu est, elle aussi, sur la bonne lancée : «J'arrive à vivre de la mode, mais je voudrais aller plus loin, que cela devienne un vrai business, le plus dur, c'est tout l'aspect marketing.»