C'est un revirement spectaculaire dans la position de Mahmoud Abbas à propos du fameux et fumant rapport de Richard Goldstone dont l'examen est reporté à mars 2010. Après avoir « marché » ou (marchandé ?) curieusement avec les Etats-Unis et Israël pour faire capoter l'examen du rapport par le Conseil des droits de l'homme de l'ONU, le président de l'Autorité palestinienne revient aussi curieusement à de meilleurs sentiments. Hier le mouvement Fatah dont il est le président a convié hier les factions palestiniennes, y compris le Hamas, à entreprendre une « action commune » pour obtenir une condamnation internationale d'Israël après la guerre de Ghaza. Difficile de saisir ce virage à 180° dans le discours d'un homme qui a tendu une perche de salut à Israël pour échapper à la condamnation et se déjuge quelques jours après en rameutant ses troupes. En réalité, Mahmoud Abbas s'est retrouvé seul contre tous en essuyant des critiques acerbes y compris dans son propre camp pour avoir « vendu la cause ». Il a en effet raté une belle occasion de se taire pour une fois que « l'ennemi » était clairement désigné coupable. Cet appel du Fatah, son parti, est donc destiné à « rattraper le coup » et peut-être rectifier le tir en direction de l'armée accusée de crimes de guerre. Mahmoud Abbas a donc opportunément sauté sur l'initiative libyenne pour examiner ce rapport du juge Richard Goldstone devant le Conseil de sécurité de l'ONU. « Nous souhaitons que notre effort commun aboutisse au jugement de l'occupation et de ses crimes, et conduise tous les généraux d'Israël et ses leaders ayant commis des crimes de guerre contre notre peuple devant la Cour pénale internationale de La Haye », a déclaré hier un haut responsable du Fatah, Jibril Rajoub, lors d'une conférence de presse à Ramallah (Cisjordanie). A cet effet, « la direction du Fatah a décidé d'inviter le mouvement Hamas ainsi que toutes les factions palestiniennes à former un seul organe national palestinien regroupant tout le monde. L'union nationale palestinienne est dans l'intérêt de tous », a ajouté M. Rajoub. Il a également appelé à « agir au niveau régional et international pour relancer le rapport Goldstone ». Et contrairement à la position officielle de l'Autorité palestinienne à Genève, le Fatah considère le rapport Goldstone comme « un témoignage convaincant afin de condamner l'occupation israélienne et permettre des poursuites contre Israël pour crimes contre le peuple palestinien, en particulier au cours de la guerre contre Ghaza ». Abbas désavoué Des propos qui s'apparentent à une cinglante mise au point voire à une mise en minorité de Mahmoud Abbas au sein même de son propre parti. Il est à rappeler que toutes les factions palestiniennes, la Ligue arabe en tant que institution et des pays arabes séparément se sont déclarés indignés par la demande de l'Autorité palestinienne de reporter l'examen du rapport accablant Israël. Résultat immédiat, le Hamas a suspendu sa participation à la réunion de réconciliation avec son frère ennemi le Fatah au Caire dont un document devrait être signé courant de ce mois. Cette sortie médiatique du Fatah vise ainsi le double objectif de corriger la « bourde » de Mahmoud Abbas et de poursuivre le processus de négociation avec son rival Hamas. Le rapport Goldstone doit être évoqué le 14 octobre au Conseil de sécurité de l'ONU dans le cadre d'un débat général sur la situation au Proche-Orient, ont indiqué les diplomates mercredi. Une bonne nouvelle dans cet océan de « nakbat », la présidence suédoise de l'Union européenne a jugé hier « digne de considération » le rapport de l'ONU fustigeant l'attitude d'Israël durant l'offensive israélienne à Ghaza, et estimé qu'il devait être discuté devant le Conseil onusien des droits de l'homme. Le rapport est « bien entendu digne de considération, je pense que M. Goldstone est une personne digne d'une grande crédibilité et d'une grande intégrité et en conséquence son rapport a du poids », a déclaré le chef de la diplomatie suédoise Carl Bildt lors d'une conférence de presse à Stockholm. « Nous avons évidemment pris note du rapport Goldstone. Il est actuellement devant le Conseil des droits de l'homme (de l'ONU à Genève) et c'est là que nous pensons qu'il doit être discuté, c'est un rapport indépendant », a dit le ministre suédois, dont le pays préside l'UE jusqu'au 1er janvier.