Maître à Ghaza depuis juin 2007, en attendant de l'être en Cisjordanie, après les prochaines élections générales, Hamas joue la montre contre Fatah et Mahmoud Abbas, le président de l'Autorité palestinienne. Une délégation du mouvement islamiste dirigée par Moussa Abou Marzouk, le numéro deux de son bureau politique en exil à Damas, était hier au Caire. Mission : demander au médiateur Omar Souleïmane, le chef des renseignements égyptiens, de trouver une «date appropriée» pour la prochaine session du dialogue inter-palestinien. Hamas ne veut plus du 26 octobre prochain, date annoncée lundi dernier depuis Amman par Ahmed Aboul Gheït, le ministre égyptien des Affaires étrangères après une rencontre avec Mahmoud Abbas et le roi Abdallah II. La raison ? Le retrait par l'Autorité palestinienne du rapport Richard Goldstone qui accuse Israël de «crimes de guerre» durant son offensive contre Ghaza entre le 27 décembre 2008 et le 18 janvier 2009 (plus de 1.400 morts palestiniens, en majorité des civils). «L'atmosphère n'est pas propice à la signature d'un accord», estiment les responsables des factions palestiniennes opposées au Fatah. Cette demande de report serait-elle la dernière ? Pas sûr. Le Caire, qui parraine les discussions inter palestiniennes, a déjà reporté à deux reprises la signature d'un accord en raison des divergences qui subsistent entre les deux parties. Hamas qui manœuvre déjà avec le Djihad Islamique pour remporter les élections législatives et présidentielles dans les territoires palestiniens, mi-2010, cherchera d'ici mars prochain à «exploiter» le rapport du Sud-Africain Goldstone sur l'opération «Plomb durci» : l'Autorité palestinienne a retiré son aval à ce rapport sous la pression des Américains. Cette «position» politique qui ne peut être corrigée par la décision du Conseil de sécurité d'avancer au 14 octobre sa réunion mensuelle sur la situation au Proche-Orient à la demande de la Ligue arabe, a ravivé les tensions et permis à Hamas de transformer Abbas, voire Fatah, en cible de critiques. Y compris à Ramallah, Cisjordanie où les réactions ont contraint Abbas à opérer un revirement. C'est dans cette ambiance de dialogue de sourds que l'Egypte se rebiffe et Israël révèle ses intentions à George Mitchell, le représentant spécial américain pour le Proche-Orient, en visite dans la région pour relancer, sans grand espoir de progrès, le processus de paix. «Je n'imagine pas que ceux qui vont tenter de reporter la signature de l'accord aspirent réellement à protéger l'intérêt national palestinien» car «l'intérêt national palestinien doit se réaliser à travers l'unité et non a division», affirme M. Aboul Gheït, jurant que son pays n'a pas été informé de la demande de report du rapport Goldstone par Mahmoud Abbas et qu'il aurait, dans le cas contraire, «conseillé» d'éviter ce report. Sûr de lui et du veto américain à New York, le chef de la diplomatie israélienne Avigdor Lieberman, lève un pan du voile de la stratégie de son pays : «Celui qui s'attend à un accord au cours des prochaines années, ne comprend pas du tout les réalités. Ils sèment des illusions», dit-il sans piper mot sur les dernières mesures d'escalade contre les Palestiniens à al Qods et la mosquée al Aqsa qui pourraient, selon le roi jordanien, entraîner la région «dans les ténèbres». D'autant que le dossier palestinien est descendu de plusieurs échelons dans le traitement médiatique aux Etats-Unis. Les récents affrontements à al Qods n'ont pas fait de gros titres et la tournée de George Mitchell ne suscite plus qu'un petit intérêt.