Le président américain Barack Obama doit être un homme comblé. Son discours qui se résume en trois mots, « yes, we can », a séduit y compris au plan international. La preuve, il vient d'être désigné prix Nobel de la paix. Plus que cela, le comité Nobel vient de faire une réelle entorse à son règlement qui consiste à récompenser les actes, et rien que cela. Autrement dit, on ne tient jamais compte des discours, et même des idéaux souvent proclamés, mais rarement sinon jamais réalisés. Ainsi en est-il des précédents présidents américains qui ont tenté de finir leur parcours – toujours à la limite du second mandat – sur un succès diplomatique. Pour l'histoire ou pour favoriser leur parti. D'ailleurs, même des Américains soulèvent cette anomalie. « Qu'a donc accompli le président Obama ? », se demande le président du Parti républicain. Pour des raisons différentes, d'autres à travers le monde ont trouvé cette distinction hâtive. Mais le comité Nobel a ses raisons et il ne s'en est pas caché. L'exposé des motifs est en lui-même une lettre de mission, ou encore une feuille de route pour Barack Obama qui se voit retourner sa devise, sous la forme d'un autre slogan « yes, you can ». Certains y trouveront de la complaisance, mais il semble par contre évident que le comité Nobel entendait lui aussi justifier ses décisions, et se faire l'interprète d'une préoccupation mondiale rongée par le désespoir, en donnant au concept de paix, son sens le plus large. Effectivement, l'Amérique peut engager une profonde réforme de sa politique étrangère, comme le suggèrent justement les propos que Barack Obama tient depuis son élection, soit il y a moins d'une année. C'est avec cette idée de changement qu'il a conquis l'électorat américain le 4 novembre 2008.Peut-être que le comité Nobel avait du mal à le croire sur parole, ce n'est pas la règle de la maison, mais il a pris au mot le président américain en faisant un prix Nobel avant même qu'il ait prouvé quoi que ce soit. Obama parle de paix, de désarmement et d'ouverture, rompant avec le discours américain qui préférait l'unilatéralisme, avec cette fâcheuse tendance à repousser les frontières des Etats-Unis, pour s'opposer, selon la vision américaine bien entendu, à « l'empire du mal », ou aux « Etats voyous », même quand l'Amérique a subi la plus grande attaque sur son propre territoire, celle de septembre 2001. Ou encore de démocratie, de dialogue entre les civilisations. L'Amérique avait alors sa propre classification, laquelle n'est pas celle de la communauté internationale. L'intérêt des Etats-Unis était alors la raison invoquée. Obama n'en pense pas moins, jusque et y compris le conflit du Proche-Orient qu'il a pris en charge avant même son investiture le 20 janvier dernier, actualité oblige puisque Ghaza subissait l'une des plus grandes agressions israéliennes. Le reste, on le voit, même s'il n'y a pas encore de percée. Mais il a réussi à faire l'unanimité internationale contre la politique israélienne de colonisation, et à redonner sa place à la diplomatie. Il fallait stimuler cette voie. Nobel vient de le faire.