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Emeutes en Algérie : le mal est institutionnel Hicham El Moussaoui. Docteur-chercheur en économie à l'université Sultan Moulay Slimane (Beni Mellal, Maroc)
Depuis quelque temps en Algérie, il ne se passe pas une semaine sans que l'on assiste à l'organisation de manifestation ou à l'éclatement d'une émeute. Le dernier en date est le soulèvement des habitants des quartiers de Diar Echems à cause d'un problème d'attribution de logements. Comment expliquer la récurrence des protestations musclées en Algérie comparativement au Maroc et à la Tunisie ? Si l'on regarde de près l'histoire de la société algérienne, on s'aperçoit rapidement qu'il s'agit d'une identité qui s'est construite sur une base conflictuelle, notamment lors de la guerre d'indépendance. Les Algériens qui entrent aujourd'hui en conflit avec leurs gouvernants ont l'impression de combattre contre le colon français d'hier. Donc, la lutte pour des revendications sociales devient une sorte de résistance et revêt de ce fait une charge émotionnelle et symbolique plus forte chez les Algériens que chez les Marocains et les Tunisiens. Si dans les trois pays du Maghreb, l'objet des manifestants et des émeutiers revêt un caractère existentiel (accès à l'eau, à la santé, au logement, au marché du travail, etc.), la perception des problèmes est davantage exacerbée et dramatisée en Algérie, car des trois pays, elle est la plus riche. Les Algériens trouvent moins d'excuses à leurs dirigeants, et ils ont raison. En fait, l'Algérie, contrairement au Maroc et à la Tunisie, est atteinte du syndrome hollandais, ou la malédiction des ressources, dans le sens où la manne financière, générée par l'exploitation des hydrocarbures, censée accélérer le développement du pays se transforme en un frein car encouragent la corruption et les comportements de recherche de rente au détriment de l'entrepreneuriat et de la création de richesses. Si les Algériens n'arrivent pas à profiter de leurs richesses, c'est parce que, d'une part, les institutions démocratiques de contrôle et de contre-pouvoirs ne fonctionnent pas correctement, obligeant les politiques à rendre des comptes. Et d'autre part, parce que les règles du jeu économique favorisent davantage le comportement rentier que le comportement productif. En conséquence, si les émeutes sont plus fréquentes en Algérie, c'est parce que le pays accuse un retard en matière institutionnelle dû à l'absence ou au non-fonctionnement des institutions favorisant la liberté d'expression, la liberté économique et le règlement pacifique des conflits.