A la rupture de médicaments essentiels s'ajoute le retrait du marché de certains produits utilisés dans la prise en charge de la douleur. Ce qui inquiète sérieusement les prescripteurs qui n'ont pas entre les mains d'autres alternatives pour soulager leurs patients, notamment les cancéreux chez qui la souffrance engendrée par la douleur est irréversible. ` Lors de la Journée d'information, organisée le 15 octobre dernier par la Société algérienne de l'évaluation et de traitement de la douleur, les spécialistes ont qualifié cette décision de scandaleuse car elle a été prise sans concertation préalable avec les professionnels. Certains sont même allés plus loin en qualifiant cette action de « suivisme ». « Ce qui va engager une situation catastrophique en termes de prise en charge, d'autant plus que l'arsenal thérapeutique pour la prise en charge de la douleur est très réduit en Algérie », a-t-on signalé. A l'issue de cette journée, trois sociétés savantes ont décidé de saisir le ministère de la Santé pour demander des explications à propos de cette décision. Dans une correspondance adressée à Saïd Barkat, ministre de la Santé, la Société algérienne de l'évaluation de la douleur et du traitement de la douleur, la Société algérienne d'oncologie médicale, la Société algérienne d'oncologie thoracique et la Société algérienne d'oncologie médicale pédiatrique ont déploré la décision « jugée hâtive de retirer le médicament sans concertation préalable des praticiens. Les trois associations s'interrogent sur ce retrait en Algérie, alors que l'association du dextropropoxyphène-paracétamol n'a présenté aucun problème en Algérie et les centres de pharmacovigilance n'ont relevé aucune incrimination de ce produit dans le contexte particulier d'autolyse », relèvent les quatre sociétés savantes en soulignant que ni le conditionnement, ni la présentation, ni notre culture ne laissent présager d'une utilisation de ce médicament à d'autres fins que thérapeutiques. Cette correspondance signée par le Pr Griene, président de la Société algérienne de l'évaluation et de traitement de la douleur, indique que l'ensemble de la communauté scientifique est préoccupée par ce problème et sollicite le ministre de la Santé pour « reconsidérer cette décision concernant la molécule en perspective d'une substitution organisée et réfléchie en collaboration avec l'ensemble des acteurs impliqués ». Il est à rappeler que l'Agence européenne du médicament (EMEA) s'était prononcée le 25 juin 2009 pour un retrait pur et simple du marché des produits à base de dextropropoxyphène, jugeant que les avantages qu'il procure « ne dépassent pas les risques » qu'il engendre, notamment de surdose fatale. Des centaines de cas de décès ont été rapportés au Royaume-Uni, notamment. Par ailleurs, cette même agence a confirmé, vendredi dernier, son avis, selon lequel les médicaments à base de dextropropoxyphène, comme le Di-antalvic, devaient être retirés du marché, mais elle réserve son avis définitif sur la forme injectable de cet antidouleur. Cependant, les laboratoires concernés ont fait appel de cet avis, et l'EMEA a dû se livrer à un nouvel examen, à l'issue duquel son comité pour les médicaments à usage humain (CHMP) a réitéré, jeudi, son opinion favorable à un retrait. En revanche, il a nuancé son avis en ce qui concerne les formes parentérales du produit (ne transitant pas par le système digestif, contrairement aux comprimés ou suppositoires, ndlr), telles que les perfusions. La Commission européenne rendra son avis définitif ultérieurement.