L 'ex-PDG de Sonatrach, Mohamed Meziane, aurait révélé, lors de ses auditions par le juge, l'ampleur de l'emprise qu'a eu Chakib Khelil sur le fonctionnement de la compagnie et les procédés adoptés par ce dernier dans les affaires douteuses de passation de marchés. Placé sous contrôle judiciaire depuis 2010, Mohamed Meziane aurait déclaré, lors de sa déposition, qu'il ne faisait qu'exécuter «les instructions de Khelil pour la signature des contrats avec des sociétés étrangères». Des contrats émaillés de graves irrégularités. Fait nouveau dans ce que rapporte le quotidien arabophone El Khabar dans sa livraison d'hier : Khelil aurait bénéficié «de cadeaux énormes». Se basant sur le procès-verbal d'audition de l'ex-PDG de la compagnie pétrolière nationale, Mohamed Meziane aurait déclaré aux juges que «Chakib Khelil s'est vu offrir des cadeaux, de luxueux appartements et une grande villa pour ses fils à Paris, par la société allemande qui a décroché un marché de télésurveillance de gré à gré». Meziane ajoute que c'est Chakib Khelil qui avait «ordonné» de signer le contrat de télésurveillance. El Watan a révélé, dans des éditions précédentes, comment tous les scandales qui ébranlent la compagnie nationale ont pour pivot Chakib Khelil et son occulte conseiller financier, Farid Bedjaoui. L'ex-ministre de l'Energie et des Mines avait, durant son règne, mis en place un système pouvant lui permettre de garder la main sur toutes les opérations d'attribution de marchés. Un système de prébendes. Malgré autant d'accusations portées contre Chakib Khelil, la justice n'a jusqu'à présent engagé aucune procédure. Débarqué du gouvernement en mai 2010, l'ex-ministre de l'Energie, un proche ami du président Bouteflika, a adopté une posture intrigante, voire méprisante. Pourquoi la justice ne l'a jamais entendu alors que tout le monde, au sein du département de l'Energie, sait que «rien ne pouvait se faire sans son aval ou son ordre» ? Il aura beau dire qu'il ignorait tout de la nature des contrats en cause dans les scandales de corruption, alors qu'il était le véritable patron-décideur pendant près de dix ans. Ne communicant pas sur les scandales qui ébranlent non seulement Sonatrach mais tout le pays, par son silence, la justice n'a pas permis de dissiper l'épais brouillard qui couvre une affaire aussi grave. Désabusée, l'opinion publique nationale est effarée par une dilapidation à grande échelle des deniers publics. Aujourd'hui, les dirigeants de Sonatrach placés sous mandat de dépôt ou sous contrôle judiciaire refusent de «payer» seuls. Les Algériens restent sceptiques face à une justice «à deux vitesses». Clémente avec les puissants, ferme et impitoyable avec les faibles, la justice algérienne, dont l'indépendance est sujette à caution, se trouve encore une fois face un test de vérité.