Le nouvel acquéreur – le magnat Mittal Lakshmi – avait conclu l'une de ses meilleures transactions contre seulement 150 millions de dollars. Sur les 24 filiales existantes à l'époque, toutes en très bon état, il n'en a retenu que 10 dont les ateliers maghrébins (AMM), la tuberie sans soudure (TSS) et la logistique (transports de rail) avec la condition d'atteindre 1,2 million de tonnes d'acier durant les quatre premières années et 1,5 au terme de 10 ans. Pour ce faire, il doit investir 175 millions de dollars. Mais Ispat, devenu Mittal Steel puis ArcelorMittal, n'a investi que 52 millions de dollars en mars 2002 dans le laminoir du rond à béton qui n'était pas une obligation, mais une option. D'ailleurs, il l'a amorti en seulement 3 ans après son entrée en production en mars 2004, car à l'époque, les prix de l'acier étaient au summum. En contrepartie, Ispat a eu des avantages à satiété. En effet, pas moins de 80 millions de dinars, soit plus de 8 millions de dollars, en consommables, pièces de rechange et matières premières. Dans les stocks, 300 000 tonnes de brames d'acier. Ce qui lui a permis d'anticiper le remboursement des 150 millions de dollars avant échéance et d'entamer le transfert des dividendes en devises vers l'étranger, tel que mentionné dans le contrat de partenariat. Douze ans après, le bilan et peu reluisant. Sur le plan d'investissement, rien n'a été fait pour rénover les installations de production, sinon des petites opérations d'entretien. L'atelier cokerie a été troqué contre l'importation du coke, la TSS est presque à l'arrêt par défaut de contrats et le haut fourneau agonise. Sur le plan social, de 11 200 travailleurs à l'époque de la signature du contrat, l'on en est à 5600 actuellement. Quant à la production, elle n'a jamais atteint l'objectif assigné et oscille entre des pics de 700 000 et 580 000 tonnes d'acier. Pourquoi l'Etat algérien a-t-il bradé son fleuron de l'industrie sidérurgique ? A cette question, Smaïn Kouadria répond : «C'étaient Ouyahia et Temmar, respectivement chef du gouvernement et ministre de l'Industrie à l'époque. Ce dernier avait qualifié l'industrie algérienne de quincaillerie et les installations du complexe Sider de ferraille. Quant à Ouyahia qui, en 2007, s'enorgueillissait devant l'ex-Assemblée nationale du ‘modèle réussi' de privatisation du complexe sidérurgique d'El Hadjar, avait tout fait pour conclure ce partenariat. Ce qui n'est pas le cas actuellement où le ministre de l'Industrie, Cherif Rahmani, a tenu à préciser que ‘les négociations de la recapitalisation d'ArcelorMittal Annaba se feront dans l'intérêt national'.»