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Election présidentielle en Iran : sempiternelles convulsions
Publié dans El Watan le 15 - 06 - 2013

Organisée hier, l'élection présidentielle iranienne intervient au moment où le pays est confronté aux sanctions économiques décrétées par les Etats-Unis et l'Union européenne (UE). Sanctions ayant pour objectif de contraindre Téhéran à renoncer à son programme nucléaire. Les grandes puissances l'accusent de vouloir se doter de l'arme atomique. Téhéran rejette ces accusations, affirmant son droit de développer son secteur nucléaire qui est de vocation civile. L'embargo économique décrété par l'Occident a privé le pays de la moitié de ses recettes en pétrole depuis 2012. La valeur du rial a chuté d'au moins 70% et l'inflation a dépassé les 30%.
A cela s'ajoutent les manques à gagner en devises. Le programme nucléaire, les rapports de Téhéran avec la Syrie, le Liban, l'Irak et l'Afghanistan, les tensions avec Israël et les monarchies du Golfe placent le pays dans un échiquier géopolitique névralgique. De ces questions dépendent les futurs rapports de Téhéran avec l'Occident, à commencer par la levée de l'embargo économique qui lui est imposé. Mais cela a un prix, le pays doit, entre autres, abandonner son programme nucléaire.
Et dans le système politique iranien, le «guide suprême», de par son pouvoir illimité, a plus d'autorité que le président.
Lors de la réélection contestée de l'actuel président Mahmoud Ahmadinejad en 2009, l'ayatollah Khamenei a tranché en faveur de ce dernier aux dépens du candidat réformateur Hossein Moussavi. Alors que des protestations populaires dénoncent la fraude. Elu en 1981 président de la République islamique, Abolhassan Bani Sadr est considéré comme le fils spirituel de l'imam ayatollah Khomeiny.
Mais ce dernier n'a pas hésité à le destituer en juin de la même année. Bani Sadr paie ainsi son hostilité à la poursuite de la guerre avec l'Irak.
L'ayatollah Montazeri est désigné pour succéder à Khomeiny. Le guide finit par l'écarter pour avoir appelé à la fin du conflit avec l'Irak et son opposition à l'exécution de prisonniers politiques. La révolution de Khomeiny en 1979 a mis l'Occident dans l'embarras. Pourtant, une occasion historique s'est présentée en Iran pour instaurer une démocratie laïque, mais les grandes puissances l'ont étouffée. Le 28 avril 1951, le docteur Mossadegh devient Premier ministre.
Il nationalise les richesses pétrolières du pays et en août 1953, un coup d'Etat organisé par Londres et Washington, l'«opération Ajax», exécuté par la CIA le destitue au profit du chah Mohammad Reza Pahlavi. Ce dernier mène une politique proaméricaine. A travers sa police politique la Savak, il lamine toute velléité d'opposition.
L'Occident de Charybde en Scylla
Il se lance dans les réformes socioéconomiques, «la révolution blanche», provoquant des émeutes en 1963 d'où émerge Ruhollah Khomeiny. Opposé à cette «révolution», il critique aussi les relations militaires du chah avec les Etats-Unis. Expulsé d'Iran en 1964, il se réfugie en Irak.
Déclaré persona non grata par le régime irakien, il s'exile en France en 1978. Cependant, le clergé chiite demeure l'unique rescapé de la répression sanglante menée par le chah. Ce qui fait de lui le canal le plus important de la colère populaire et ses aspirations à la démocratie et la souveraineté nationale. Sachant que les Iraniens sont exaspérés par la présence étrangère, notamment américaine sur leur territoire. Le chah quitte le pays en janvier 1978. Le 1er février 1979, Khomeiny entre à Téhéran, consacrant ainsi le pouvoir des ayatollahs. Les événements se précipitent.
Le 4 novembre de la même année, des étudiants occupent l'ambassade américaine dont le personnel ne sera libéré que le 20 janvier 1981. En septembre 1980 est déclenchée la guerre irano-irakienne suite à l'agression des troupes de Saddam Hussein.
Au paroxysme de ce conflit, éclate le scandale de l'Irangate.
Il s'agit de vente secrète d'armes américaines pour l'Iran. L'argent récolté sera versé aux contre-révolutionnaires nicaraguayens engagés dans une guerre contre le gouvernement sandiniste. En plus, les Américains comptent obtenir la libération de leurs otages au Liban.
En octobre 1986, un avion américain transportant des armes pour les contras s'écrase au Nicaragua. Les forces sandinistes capturent un pilote rescapé du crash, avoue les secrets de l'opération et donne les noms de ses architectes. En novembre de la même année, l'hebdomadaire libanais Al Shiraa révèle l'affaire et évoque le voyage du conseiller national à la sécurité Robert McFarlane à Téhéran. Le scandale secoue même la présidence américaine. L'opération s'est déroulée en dehors du processus institutionnel, en violation de la Constitution et des décisions du Congrès, et de l'esprit de l'opération «Staunch» destinée à empêcher Téhéran de s'approvisionner d'armes même auprès des alliés de Washington.
Nommé commandant en chef des forces armées, Hachemi Rafsendjani convainc Komeiny à accepter la résolution 598 du Conseil de sécurité de l'Organisation des Nations unies (ONU) qui met fin à la guerre avec l'Irak en 1988. Khomeiny meurt en juin 1989. Lui succède comme guide Ali Khamenei. Le nouveau guide tisse de forts liens avec Hachemi Rafsandjani qui finit par devenir président de la République. Ils appellent à la libéralisation économique, des réformes politiques et la reconstruction du pays. En juin 1992, pour trouver des capitaux, l'Iran adopte une loi sur l'investissement privé, les étrangers ouvrent ainsi droit à posséder la totalité d'une entreprise iranienne.
Son successeur Mohammad Khatami est considéré lui aussi comme réformateur. Mais cela n'empêche pas le président George W. Bush en janvier 2002 de parler de l'«axe du mal» pour désigner les pays qui soutiennent le terrorisme et souhaitent se doter de l'arme nucléaire, à savoir l'Irak, l'Iran et la Corée du Nord. L'élection d'Ahmadinejad n'a fait qu'exacerber les tensions entre Téhéran et l'Occident. Son successeur héritera d'un lourd fardeau. Quant à l'Occident, sa politique avec Téhéran rime avec ses intérêts.
Il destitue Mossadegh au profit de Reza Pahlavi qui s'impose en despote. Il lâche ce dernier vu ses ambitions régionales. Une aubaine se présente pour Khomeiny pour fonder la République islamique.
Ainsi de Charybde en Scylla, les puissants de ce monde, qui font et défont les présidents, modifient les frontières, dans leur quête inassouvie de zones d'influence, se retrouvent face à un écueil qui fait de cette région aux antagonismes multiples un magma.


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