Alors que les Egyptiens, à travers leurs chaînes de télévision (publiques et privées), ont été tenus en alerte sur à peu près tout ce qui gravite de près ou de loin autour de notre équipe nationale, le public algérien, en revanche, concernant la photographie de l'adversaire des Verts, a été, disons-le, maintenu sur sa faim jusqu'au bout par l'Unique qui, en s'obstinant de manière très générale à privilégier le commentaire « maison » dans un seul sens, a manqué terriblement de professionnalisme dans cette compétition médiatique. Si les télés cairotes (les chaînes non contrôlées par le pouvoir, surtout, à l'image de Dream TV) se sont laissées entraîner dans une dangereuse dérive d'intox qui a fini par secouer le sérail politique de part et d'autre avant de l'amener à intervenir, par le canal de la diplomatie, pour arrêter une spirale d'insultes et de contrevérités qui risquait d'empoisonner les bonnes relations entre les deux pays, elles n'ont pas pour autant failli à leur mission, celle de donner le maximum d'infos sur notre représentant pour permettre à leur public de se faire une idée précise sur les forces en présence qui vont s'affronter ce 14 novembre au Cairo Stadium, et mesurer les pourcentages de chance de qualification de chacune. Ainsi, au moment où Rabah Saâdane était très sollicité du côté du Nil pour donner son avis sur le match et répondre aux questions les plus indiscrètes sur l'état d'esprit de nos joueurs à la veille de cette rencontre explosive, les téléspectateurs algériens attendaient vainement que son alter ego égyptien, Hassen Shehata, apparaisse sur l'un de nos plateaux de télé face à nos journalistes, histoire de lui tirer les vers du nez pour en savoir un peu plus sur le team qu'il dirige. Ainsi, au moment où notre ambassadeur au Caire était harcelé de demandes d'interview, le représentant diplomatique des Pharaons à Alger était superbement ignoré, pour ne citer que cet exemple qui n'est en rien déterminant dans le domaine de la communication, sauf peut-être que son intervention publique, si on le lui avait demandé, aurait contribuer un tant soit peu à calmer des esprits trop échauffés. En tout cas, les Algériens auraient été intéressés de connaître son opinion sur la virulence du ton employé par les médias de son pays. Ceci pour dire qu'entre la télévision algérienne et ses homologues égyptiennes (les écrans sont plus nombreux là-bas), existe une sacrée différence en matière d'expérience professionnelle et du traitement médiatique d'événement de cette importance qui nécessite assurément une approche plus en rapport avec la réalité du terrain, d'une part, et les attentes du public, d'autre part. Autrement dit, si chez nous, on continue de privilégier le travail « routinier », aux alentours des pyramides, on a une autre idée sur la façon de faire fonctionner une caméra et un micro. A ce titre, on peut sans risque se tromper de reconnaître que ce sont les chaînes égyptiennes qui se rapprochent le plus des normes télévisuelles universelles dans la mesure où elles arrivent toujours à faire le saut pour aller chercher l'information là où elle se niche. De nos jours, on ne peut plus se contenter de rester bien au chaud dans un studio, autour d'une table ronde aussi fournie soit-elle en spécialistes du football, et animer des émissions dites spéciales avec pratiquement les mêmes interlocuteurs alors que l'information du jour se trouve ailleurs. Certes, les analyses et les commentaires des gens avisés de la balle ronde sont toujours les bienvenus, mais quand ceux-ci restent trop enfermés dans le « débat » maison, ils deviennent à la longue lassant et perdent forcément de leur effet. C'est, hélas, à ce genre de concertation que les émissions sportives (ou autres) nous ont habitués. Si on prend le match capital que les Verts vont disputer au Caire et auquel tout le peuple algérien se retrouve suspendu, on s'aperçoit que les services sportifs de l'Unique ont rarement fait les « extérieurs ». L'EN est entrée en stage dans un complexe sportif de Florence en Italie, et on n'a eu droit qu'à quelques images furtives de ce regroupement alors que les supporters algériens bouillonnent en voulant connaître le moindre détail sur leur sélection. Jamais de mémoire de sportif une rencontre de football n'a soulevé autant de passion, d'engouement, de fièvre collective en Algérie. En termes de tension, le match qui va se jouer ce samedi a dépassé tous les rendez-vous chauds et chocs que l'équipe algérienne a eu à affronter à ce jour. L'hystérie a même dépassé la passion qui avait entouré un certain Algérie-Allemagne. C'est dire que la confrontation est en fait une rencontre à plusieurs dimensions. Elle est sportive, culturelle, et même… politique. Le hasard a voulu que les deux pays se retrouvent à ce stade, avec d'un côté une équipe nationale qui a deux buts d'avance, et de l'autre, une sélection égyptienne qui jouera devant son public. Les deux antagonistes ont besoin de la qualification et donc partent avec la même ambition et la même volonté de gagner. Un vrai combat de titan que le nombrilisme de notre petit écran n'a pas su traduire à sa juste émotion.