Pas de reprise de négociations de paix avec Israël sans le gel des colonies. Mahmoud Abbas le fait savoir dans un discours prononcé, hier, à Ramallah en Cisjordanie, à l'occasion du 5e anniversaire de la mort de Yasser Arafat, leader historique de la cause palestinienne. Usant d'un ton ferme, M. Abbas semble décidé à ne plus courber l'échine. Il réclame ainsi un gage de bonne volonté de la part de l'Etat israélien et met son principal sponsor, à savoir Washington, devant ses responsabilités. « Le retour aux négociations dépend de l'adhésion d'Israël aux termes de référence de la paix, et cela comprend l'arrêt de toutes les colonies, y compris la croissance naturelle dans les implantions et incluant Jérusalem », a clamé M. Abbas. S'exprimant devant des dizaines de milliers de manifestants rassemblés pour rendre hommage au défunt Yasser Arafat, le président de l'Autorité palestinienne a ajouté : « Il est de notre droit de demander le démantèlement de toutes les colonies car elles sont illégales. » Mahmoud Abbas, qui a annoncé sa volonté de ne pas briguer un nouveau mandat lors des prochaines élections générales en janvier 2010, cherche, selon toute vraisemblance, à terminer son mandat la tête haute, lui qui a été accusé par ses adversaires, notamment le Hamas, de n'avoir rien fait pour faire avancer la cause palestinienne. Ce revirement spectaculaire du président Abbas est considéré par nombre de Palestiniens comme un réveil tardif – mais nécessaire – de l'Autorité palestinienne. « Le moment de vérité est venu et nous devons être francs avec le peuple palestinien et lui dire que nous ne sommes pas parvenus à une solution à deux Etats (israélien et palestinien) après 18 ans de négociations », a indiqué à la presse le négociateur palestinien Saëb Erakat. Selon lui, « le président Abbas est arrivé au point où il faut dire qu'Israël ne veut pas de solution ou de processus de paix menant à l'établissement d'un Etat palestinien indépendant ». Jeu et enjeux Cinq ans après la mort de Yasser Arafat, fondateur de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP), le processus de paix israélo-palestinien se trouve au point mort. Les négociations sont bloquées depuis plus d'un an en dépit des efforts de la communauté internationale pour le relancer. La poursuite de la politique israélienne de la colonisation avec la construction de nouvelles colonies en Cisjordanie constitue un véritable frein à l'initiative de paix entre les deux Etats. Même le gel partiel de la construction, proposé par l'Etat hébreu, ne se concrétise toujours pas sur le terrain. La demande du président palestinien va-t-elle être prise en compte ? Il faut rappeler que le gouvernement de Benyamin Netanyahu refuse tout préalable à la reprise des négociations. Et le président américain, Barack Obama, qui a beaucoup parlé du processus de paix israélo-palestinien, n'a jusque-là rien apporté de nouveau. Son appel au gel des colonies est complètement ignoré par les Israéliens qui lui demandent de reconsidérer sa position. Pourtant, Barack Obama s'était montré ferme lors de son discours « historique » au Caire. Ayant reçu, l'un après l'autre, en mai dernier, le Premier ministre israélien, Benyamin Netanyahu, et le président de l'Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, à la Maison-Blanche, le président américain a demandé à Israël de faire un effort sur la question des colonies. Mais voilà que quelques mois après, c'est la Maison-Blanche qui cède devant le lobby sioniste. Il y a quelques jours, la secrétaire d'Etat américaine, Hillary Clinton, a appelé Israéliens et Palestiniens à relancer le processus de paix « sans conditions ». Ainsi, Washington ne fait plus du gel des colonies la condition sine qua non d'un retour à la table des négociations. Mahmoud Abbas se sent-il trahi par l'Administration Obama ? Sûrement.