Des dirigeants israéliens ont menacé les Palestiniens de rétorsion s'ils proclament un Etat indépendant sans accord avec Israël, tout en doutant de leur détermination à mettre un tel projet à exécution. Le Premier ministre Benyamin Netanyahu a mis en garde dimanche soir la direction palestinienne contre toute « action unilatérale » mais sans préciser quelles mesures Israël pourrait prendre. L'avertissement de Netanyahu répond à la décision des Palestiniens de demander à l'ONU de reconnaître leur indépendance. Les Palestiniens ont l'intention de saisir le Conseil de sécurité de l'ONU afin d'obtenir son soutien en faveur de la création d'un Etat palestinien indépendant dans les frontières de juin 1967 (soit avant l'occupation israélienne). L'Autorité palestinienne a sollicité, hier, l'appui de l'Union européenne (UE) à son projet. « Toute action unilatérale défera la trame des accords passés et entraînera des actions unilatérales d'Israël », a toutefois averti Netanyahu, qui a appelé à nouveau l'Autorité palestinienne à reprendre la négociation, stoppée depuis plus d'un an, « sans condition préalable ». Plus explicites, des ministres de son parti, le Likoud (droite), ont énuméré toute une série de mesures de rétorsion qu'Israël pourrait prendre, y compris l'annexion unilatérale de blocs de colonies en Cisjordanie, ce qui reviendrait à annuler les accords de paix d'Oslo de 1993. Le ministre de l'Environnement, Gilad Erdan, a accusé les dirigeants palestiniens de « jouer avec le feu » sur la question d'un Etat indépendant. Mais il a estimé qu'il pourrait s'agir d'une « tempête dans un verre d'eau » et d'« une manœuvre interne destinée à rehausser l'image de Mahmoud Abbas », le président affaibli de l'Autorité palestinienne. « Les Palestiniens auraient eux-mêmes beaucoup à perdre en cas de proclamation unilatérale d'indépendance », a ajouté ce proche de Netanyahu, évoquant la possibilité qu'Israël « stoppe les transferts d'argent » dus à l'Autorité palestinienne en vertu des accords signés sur les tarifs douaniers. Israël, qui occupe la Cisjordanie, pourrait également, selon lui, rétablir un certain nombre de barrages routiers retirés dernièrement et – plus sérieux – « procéder à une annexion formelle d'une partie des implantations » juives en Cisjordanie. Le quitte ou double Le ministre travailliste du Commerce et de l'Industrie, Benyamin Ben Eliezer, a reconnu que l'initiative palestinienne « traduisait la frustration d'une population qui ne voit pas d'issue à une occupation qui dure depuis près de 43 ans ». S'inquiétant d'un « isolement croissant d'Israël sur la scène internationale », le ministre travailliste a exhorté le gouvernement « à faire tous ses efforts pour relancer au plus vite les négociations », y compris en annonçant un gel total mais temporaire de la colonisation. Du côté palestinien, le porte-parole de M. Abbas, Nabil Abou Roudeina, a accusé Israël de « chercher des prétextes et des excuses pour s'opposer à l'établissement d'un Etat palestinien ». « La réponse du Premier ministre est un aveu que l'actuel gouvernement israélien ne veut pas la paix », a commenté M. Roudeina. La reprise des pourparlers achoppe sur le contentieux des colonies, les Palestiniens réclamant d'abord un arrêt total des implantations en Cisjordanie occupée (dont Jérusalem-Est), alors que le gouvernement Netanyahu offre seulement un gel partiel de la construction. Les Palestiniens, qui ont suspendu les négociations il y a près d'un an après des années de tractations infructueuses, accusent les Israéliens d'être les premiers à mener « une action unilatérale » en créant des faits accomplis de colonisation, 500 000 Israéliens s'étant désormais installés en Cisjordanie (dont 200 000 à Jérusalem-Est).