Après l'escalade dans la bataille médiatique livrée entre l'Algérie et l'Egypte, caractérisée par un déchaînement féroce du côté du Nil, c'est sur le terrain politico-diplomatique que l'on joue les prolongations du match Algérie-Egypte. A un point tel que même le président égyptien Hosni Moubarak descend « officiellement » dans l'arène. Ainsi, à la faveur d'un discours prononcé hier matin au Parlement, le chef de l'Etat s'est voulu menaçant à l'égard de tout ce qui pourrait porter atteinte à ses ressortissants. Sans citer explicitement l'Algérie, il fait clairement allusion aux fâcheux incidents qui ont entaché le déroulement « fair-play » de la rencontre entre les deux pays pour une qualification au Mondial sud-africain de 2010. Assurant que l'Egypte ne fera pas « preuve de laxisme envers ceux qui portent atteinte à la dignité de ses citoyens », Moubarak ajoute, dans ces déclarations à « usage interne » que « le bien-être de nos citoyens à l'étranger relève de la responsabilité de notre pays, nous nous assurons que leurs droits soient respectés et rejetons les violations (...) qui sont commises à leur égard ». Pourtant, les « violations » qui indignent au plus au point le président ont vite été démenties par Khartoum, qui a abrité le match d'appui entre les deux rivaux. Montées de toutes pièces, gonflées et relayées par les médias égyptiens et par certaines personnalités, ces « attaques sauvages » subies par les supporters des Pharaons auront surtout provoqué le courroux de l'hôte soudanais. Un porte-parole de la police de Khartoum, Abdel Majid Al Tayeb, a même affirmé que seules quatre personnes avaient été légèrement blessées dans quelques accrochages entre les deux camps. Poignée – moindre que les blessés du Caire – qui augmente spectaculairement une fois l'information émise par le gouvernement de Moubarak. Le ministre égyptien de la Santé, Hatem El Gabali, a ainsi indiqué qu'ils étaient 21, précisant toutefois qu'il s'agissait de « blessures légères ». Ballet diplomatique et représailles Depuis le caillassage du bus des Verts, à la veille du match décisif du 14 novembre, c'est à un véritable ballet d'ambassadeurs que se sont livrées les deux parties. D'abord le représentant égyptien à Alger, puis celui de l'Algérie au Caire, gentiment dans un premier temps, puis plus « sérieusement ». Même l'ambassadeur égyptien à Khartoum a été convoqué par le gouvernement soudanais pour faire taire la propagande du régime de Moubarak et lui signifier son ingratitude. Puis, après avoir exprimé ouvertement son mécontentement à la suite de la diffusion par des médias égyptiens de « fausses informations », le Conseil des ministres soudanais a déclaré, lors de sa réunion de jeudi, que « tout s'est bien passé » lors de cette rencontre, et ce, sans pour autant mettre un terme à l'hystérie médiatique égyptienne. Les dernières « consultations » des ambassadeurs ont d'ailleurs donné lieu à de folles spéculations quant à l'avenir des relations diplomatiques entre les deux pays pourtant « frères ». D'autant plus que même les héritiers du « trône » ne se sont pas encombrés d'une quelconque notion de « fraternité » dans leurs propos peu amènes quant à l'Algérie et à son peuple. Pour le fils aîné du président égyptien, Alâa Moubarak, les supporters algériens ne sont rien moins que des « mercenaires » et des « terroristes ». Le dromadaire égyptien ne verrait-il que la bosse algérienne en oubliant la grosseur de la sienne ? Car du côté du Nil, nul n'a pipé mot autour des violences qui sont survenues au Caire contre les Verts et leurs supporters, ou encore sur le saccage de la représentation diplomatique algérienne. Mais, par contre, l'on commente à l'envi les « représailles », plus que condamnables du reste, qui ont ciblé les locaux d'Egypt Air et du groupe Orascom à Alger. C'est donc « un match nul, la balle au centre » dans les actes de vindicte populaire. Les officiels algériens, à leur tête le président de la République Abdelaziz Bouteflika, n'ont toujours pas répondu aux provocations de Moubarak. Ce qui donne à ce dernier un avantage sûr. Dans la récupération mesquine et stérile de ce qui n'aurait jamais dû sortir d'un terrain de football, aussi décevant soit le résultat…