Peut-on encore critiquer Israël en France sans être taxé d'antisémitisme ? Peut-on encore défendre un Palestinien, même innocent, sans être traité de gauchiste attardé, voire de terroriste ? Peut-on dire encore, quand une rare occasion se présente, à la télévision que si l'Elysée se démène pour la libération du soldat franco-israélien Shalit enlevé par le Hamas, elle s'honorerait à faire de même pour le civil Salah Hamouri, un ressortissant franco-palestinien, âgé de 24 ans, enfermé dans une prison israélienne depuis 2005 ? Paris De notre correspondant L'acteur François Cluzet s'est retrouvé pris dans une polémique violente. Invité récemment sur France 2 dans l'émission dominicale de13 h 15 , il a été accusé de « désinformation » et « d' incitation à la haine » par le Bureau national de vigilance contre l'antisémitisme (Bnvca), qui en a appelé au CSA. Pas moins. Le tort de François Cluzet ? Il milite pour la libération de Salah Hamouri. Et pour lui, le Franco-palestinien purge « un délit d'opinion », simplement parce qu'il a dit qu'il était contre les colonisations des territoires palestiniens. Le Bnvca, s'est indigné contre « un plaidoyer en faveur de la libération du terroriste franco-palestinien », et que Salah Hamouri a été condamné par la justice d'Israël pour avoir « en sa qualité de leader d'une faction du FPLP, projeté un attentat, avec des complices, contre la personne du grand rabbin Oyadia Yossee ». Le Bnvca attendait du CSA qu'il contraignît la rédaction de France 2 « à rétablir les faits ». France 2 est revenue sur le sujet ce dernier mois par un nouveau traitement plus « équilibré », selon les termes du présentateur. De mère française et de père palestinien, Salah Hamouri conteste les faits et se déclare seulement sympathisant du FPLP. Il a été arrêté lors d'un contrôle d'identité à un check-point le 13 mars 2005. Aussitôt conduit en prison et après trois ans de préventive, il accepte, en avril 2008, la proposition du procureur militaire israélien de « plaider coupable » afin d'atténuer sa condamnation. Il écope ainsi de sept années de prison (au lieu de 14 ans dans ce cas de figure). En France, un comité national de soutien a été mis en place en octobre 2008. Salah Hamouri a été déclaré citoyen d'honneur de la ville de Grigny, le 16 mai 2009. De son côté, Nicolas Sarkozy a adressé un courrier à Benyamin Netanyahou, premier ministre israélien, afin de réclamer un « geste de clémence ». François Cluzet n'a pas caché ses doutes des efforts réellement déployés par la France pour obtenir l'extradition de Salah Hamouri. Le 14 octobre dernier, la mère de Salah Hamouri a écrit une lettre au président français pour demander audience. « Je suis une mère et tout comme les parents du caporal Shalit, je resterai mobilisée avec de nombreuses personnalités et notre comité de soutien jusqu'à la libération de mon fils dont le seul ‘'crime'' est de résister pacifiquement a une occupation que vous avez-vous-même évoquée en parlant de la création nécessaire d'un Etat palestinien. Son second " crime " serait de ne pas regretter. On se demande bien d'ailleurs ce qu'il aurait à regretter à part d'avoir passé les meilleures années de sa vie en prison. » Et de rappeler : « Je vous remercie d'être intervenu auprès du premier ministre israélien en demandant une mesure de clémence (cependant, vous n'avez jamais demandé la libération de mon fils). Celle-ci a été refusée de façon cinglante, et depuis : plus rien. » Elle réitère sa demande d'audience. « Je souhaiterais donc vous rencontrer personnellement, tout comme monsieur Shalit a été reçu par vous de même que les autres familles à qui vous avez pu procurer espoir et réconfort quand leurs proches étaient en difficulté à l'étranger. » Aucune réponse à ce jour. Site de soutien : http://www.salah-hamouri.fr/