Tamanrasset De notre envoyé spécial En tamachaq, «Tartit» signifie union. Tartit est justement le nom d'un groupe musical composé d'artistes mauritaniens, burkinabés et maliens, venus à Tamanrasset pour participer au 4e Festival international des arts de l'Ahaggar. Vendredi soir, au campement de Tidessi, à 8 km au nord de la capitale de l'Ahaggar, les rythmes targuis de Tartit ont adouci quelque peu une froide nuit de novembre. L'imzad était sorti de son cadre intime pour «monter» sur scène accompagner les chants, les percussions et les guitares de Tartit. «L'imzad est l'instrument de la femme targuie. C'est un instrument en voie de disparition», a regretté Fatimata Walet Oumar, leader de Tartit, rencontrée dans les coulisses. Elle a souhaité une aide de l'Algérie pour la création d'une école de formation de filles pour l'imzad au Mali. Un projet qu'elle traîne depuis dix ans, faute de financement. «C'est un petit projet qui n'est pas très coûteux», a-t-elle noté. Les chants de Tartit sont gorgés de poésie et de sensualité sahariennes. Les notes volent comme des pétales de roses dans un ciel serein. La musique est parfois parole, la poésie mélodie. La guitare électrique, qui intervient après de longs moments de chants profondément sahéliens basés sur les variations vocales et les percussions, est sollicitée pour souligner que l'asouf, le style musical contemporain des Touareg, est assimilé à une expression de militance. C'est un porteur de voix pour dire les douleurs d'hier et d'aujourd'hui. «Nous ne sommes pas des bandits, nous sommes un peuple qui souffre», a lancé, entre deux chansons, Fatimata Walet Oumar à propos des Touareg. Elle a souhaité que le monde entier vienne à la rescousse du désert, là où beaucoup de choses manquent. Tartit est déjà une histoire de souffrance. Ce groupe a été créé en 1995 dans un camp de réfugiés maliens entre le Burkina Faso et la Mauritanie. «La directrice du festival belge ‘‘Voix de femmes'' cherchait à l'époque un groupe de chanteuses targuies. On lui avait dit non. Mais, pour nous, rien n'était impossible. En réalité, tout le camp faisait de la musique. Nous avions parmi nous la meilleure joueuse de tindi, les meilleurs danseurs. Nous avons composé le groupe avec trois femmes et un griot, et entamé une tournée en Belgique. Ce groupe nous aide à faire connaître notre culture qui est en danger et défendre la culture traditionnelle», s'est rappelé Fatimata Oulat Oumar, qui porte le surnom de Disco. Tartit, qui est composé également de Zeinabou Walet Oumar, Tafa Al Hosseini, Fadimata Walet Amoumine, Mousa Ag Mohamed, fera ensuite le tour du monde et mettra en avant les difficultés que vivent les Touareg. Selon Fatimata Walet Oumar, la musique traditionnelle des Touareg célébrait par le passé l'amour, la paix, la beauté des femmes, la bravoure des hommes, la splendeur de la nature. «Cette musique a changé quelque peu. Elle est devenue triste, mélancolique. Une musique qui évoque les problèmes de notre peuple. Cela nous permet de résister un peu», a-t-elle précisé, rejetant le label commercial de «musiques du monde». Les problèmes des Touareg sont, d'après elle, l'analphabétisme, le manque d'eau dans le désert, les centres de santé, le développement. «Il faut commencer par l'éducation. L'éducation est la base de tout. Il y a aussi des problèmes politiques qui sont liés à notre nature de guerriers. Les Européens qualifient dans les médias les Touareg de terroristes. Non ! Les Touareg sont un peuple qui aime la tranquillité».