La conférence d'un jour sur le Proche-Orient qui doit se tenir aujourd'hui à Londres, à l'initiative du Premier ministre britannique Tony Blair, devait à l'origine porter sur les moyens d'accélérer le processus de paix dans la région. Sous la pression d'Israël et des Etats-Unis, l'ordre du jour a été complètement changé au profit de Tel-Aviv et ne se concentre plus que sur la nécessité pour la direction palestinienne de procéder à des réformes politiques et économiques. Ainsi les questions brûlantes, tels la construction par Israël du mur de séparation qui engloutit quelque 7% des territoires palestiniens, le statut d'El Qods, le retour des réfugiés, le démantèlement de toutes les colonies juives à Ghaza et en Cisjordanie et l'établissement d'un Etat palestinien viable ont été complètement retirées de l'ordre du jour. Cette volte-face n'a pas été du goût des Palestiniens qui ont manifesté leur mécontentement en menaçant de dépêcher à Londres une délégation de second rang. Il a fallu l'intervention de Tony Blair en personne pour que le président palestinien Mahmoud Abbas décide en dernière minute de faire le déplacement à Londres. Cependant, son Premier ministre Ahmad Qoraï restera à Ramallah. La presse londonienne cite des responsables palestiniens qui affirment que la conférence, qui se tiendra en présence des représentants d'une trentaine de gouvernements et d'organisations internationales, dont la secrétaire d'Etat américaine Condoleezza Rice, Kofi Annan et des délégations arabes, « ne fera rien pour obliger Israël à respecter ses engagements vis-a-vis de la feuille de route ». Israël a pesé de tout son poids dans l'écriture du document final de la conférence. Le conseiller personnel du Premier ministre Ariel Sharon, Don Weissglass, s'est déplacé à deux reprises à Londres pour exiger, et obtenir, des changements au communiqué final. Selon le journal de centre-gauche, The Guardian, qui a obtenu une copie d'un projet de document final, il n'est en effet plus question de demander à Israël d'appliquer la Feuille de route comme sont en train de le faire les Palestiniens. Les Palestiniens sont furieux, note le journal, qui cite à ce propos le vice-Premier ministre palestinien, Abdallah Abdallah : « L'idée originale de la conférence était qu'elle porte plus sur la nature politique du problème, une conférence de paix. Les Israéliens seront absents. Par conséquent, les Britanniques ont pensé à une rencontre plus modeste. » « C'est inadmissible », a-t-il ajouté. Ariel Sharon a obtenu des assurances de Tony Blair, lors de la visite de ce dernier à El-Qods en décembre 2004, que la conférence de Londres se limitera à discuter les réformes politiques palestiniennes, ne sera pas d'ordre politique et n'exigera pas de Tel-Aviv de souscrire aux termes de la Feuille de route. « Le Premier ministre britannique ne veut pas également provoquer le courroux de son maître à la Maison-Blanche, George Bush », note à ce sujet The Daily Mirror. Après tout, il ne faut pas oublier que lors de sa visite aux Etats-Unis, Blair a soutenu publiquement la déclaration de Bush qu'Israël a le droit de garder certaines colonies juives en Cisjordanie et que les Palestiniens devraient se contenter d'un Etat bantoustan dans des territoires qui, au fil des ans, ont été réduits à une peau de chagrin. Tony Blair, surnommé le « poodle » (caniche) de Bush, ne fera rien qui déplaise à son maître. C'est pour cette raison que les experts ne s'attendent pas à ce que la conférence de Londres contribue de manière efficace à faire appliquer la justice et faire valoir les droits du peuple palestiniens à un Etat viable.