La présence syrienne au Liban a volé la vedette à la Palestine qui devait dominer la conférence de Londres tenue mardi à l'initiative du Premier ministre britannique, Tony Blair. Les Etats-Unis, la France et la Grande-Bretagne ont ainsi saisi l'occasion pour demander le retrait des troupes syriennes du Liban. La secrétaire d'Etat américaine, Condoleezza Rice, a ainsi utilisé le podium du Queen Elizabeth Hall où s'est tenue la conférence pour exiger que Damas retire ses troupes et ses services de sécurité du Liban et de mettre un terme à son appui aux organisations palestiniennes, tels le Djihad islamique et Hamas, ainsi qu'à l'organisation libanaise du Hezbollah, « la fierté du monde arabe, la seule force qui a infligé une défaite cuisante à Israël en l'obligeant à quitter le Sud-Liban par la force des armes, et qui est représentée par huit députés élus au Parlement libanais », écrit à ce propos un journaliste du quotidien londonien The Independent. Et ce n'est pas une surprise si le Premier ministre britannique, Tony Blair, qui a pourtant reçu en grande pompe le Président Bashar Al Assad à Londres en 2003, a joint sa voix à celle de « Condi » en demandant les mêmes exigences dans une interview au Guardian hier. Les analystes à Londres s'accordent à dire que même si la conférence a momentanément remis la question palestinienne à l'ordre du jour, elle « n'a pas produit un quelconque progrès dans l'accélération du processus de paix au Proche-Orient », écrit à ce sujet The Guardian. Sans la présence d'Israël, qui a refusé à ce que la rencontre de Londres porte sur la reprise des négociations entre Tel-Aviv et l'Autorité palestinienne, la conférence a été d'ordre purement technique dans la mesure où les discussions ont essentiellement porté sur les réformes politiques et économiques que le gouvernement de Mahmoud Abbas doit mener pour passer à l'étape ultime : une conférence internationale sur les mesures pratiques de règlement des véritables problèmes : l'arrêt de la construction des colonies juives et leur démantèlement, le statut d'El Qods, le démantèlement du mur de séparation, le retour aux frontières d'avant-1968, le problème de l'eau et la question des réfugiés palestiniens. Entre-temps, il a été demandé aux Palestiniens dans le communiqué final de réduire leurs services de sécurité, au nombre de 13 organisations actuellement, à trois, l'abolition des cours de sécurité d'Etat ainsi que la construction de tribunaux et de prisons. Les Palestiniens doivent également adopter de nouvelles lois électorales et tenir des élections parlementaires libres. Ils doivent aussi lutter contre la corruption et réduire les démarches bureaucratiques afin d'attirer les investisseurs étrangers et réduire les dépenses publiques. Les gouvernements occidentaux et arabes ainsi que les organisations financières internationales se sont engagés à fournir un appui financier et technique pour les élections et les réformes judiciaires et administratives. Une conférence sur les pays donateurs sera organisée à la fin du mois de juin. Le Président palestinien a déclaré que la conférence montrera au peuple palestinien que le monde n'a pas oublié sa souffrance et qu'il était déterminé à l'aider à construire son propre Etat. Cependant, « les Palestiniens savent qu'Israël est le grand vainqueur de cette conférence dans la mesure où rien ne lui a été demandé à part, en des termes généraux, de s'en tenir à la lettre et l'esprit de la feuille de route », commente un expert. « Les Palestiniens ont beau tenir des élections libres et propres, faire de plus en plus de concessions politiques et territoriales, obliger Hamas et d'autres groupes militants à baisser les armes, Israël et les Etats-Unis demanderont toujours plus afin de mettre l'Autorité palestinienne dans une situation de faiblesse et lui faire accepter des demi-solutions qu'ils font passer pour de lourdes concessions de la part d'Ariel Sharon », ajoute-t-il.