Annaba. De notre envoyé spécial Faut-il assassiner les parents pour ouvrir les portes de la maison et sortir à l'air libre ? Chahinez Neghouache tente dans Khalfa al abwab (Derrière les portes), pièce produite par la coopérative Echemaa de Constantine et présentée lundi au théâtre Azzedine Mejdoubi de Annaba en compétition au 3e Festival national du théâtre féminin, de répondre à ce dilemme qui se pose à quatre enfants enfermés, ou qui ont l'impression de l'être. Le grand frère (Chaker Boulemdaïs) dénonce l'ordre oppresseur des parents. Il est attentif aux bruits des pas, à la porte qui s'ouvre, aux éclats de voix du père. Un père fouettard qui le persécute, le traite de diable, lui demande de partir loin, lui refuse de rêver. Le frère cadet (Ramzi Labiod) est du même avis, mais semble plus réticent à l'idée du meurtre. Lui aussi voudrait retrouver les grands espaces, sortir à la vie, sauter les murs. La sœur aînée (Chahinez Neghouache) envisage tous les plans pour «casser» la baraque, mettre le feu, souhaiter un séisme. La sœur cadette (Mouni Boualem) est, elle, figée par la peur, ne veut pas bousculer l'ordre établi. Elle suit ses frères et sœur mais n'est pas convaincue par leur projet. Le grand frère se rappelle de toutes les promesses non tenues par le père par le passé. Comme on est dans une forme de théâtre dans le théâtre, les rôles changent. Tout se passe sur scène. Les deux sœurs deviennent des policiers qui recherchent l'assassin, puis le frère cadet se métamorphose en procureur-tyran, accuse le tueur de tous les maux : l'occupation de l'Irak et de l'Afghanistan, l'assassinat d'El Hariri et d'El Gueddafi… Entre burlesque et absurde, la pièce est parfois plombée par le débordement du symbolisme. La représentation débute par une déclamation, totalement inutile, des poèmes de Abou Kacem Chabbi, Ahmed Fouad Najm et Mahmoud Darwich. Il en est de même pour ce clin d'œil à Che Guevara à travers la reprise de la chanson de Nathalie Cardone, Hasta siempre, donnant une désagréable impression de déjà vu, déjà entendu, facile à avaler. Le metteur en scène aurait pu faire preuve de plus d'imagination, de créativité pour proposer autre chose. Disons, quelque chose de plus contemporain, plus frais. La pièce porte également cette tare d'être la reprise d'une adaptation tunisienne du texte du dramaturge cubain José Triana, Nuit des assassins. Zitouni Bouserhane a intitulé sa pièce adaptée Al rih (le vent). Chahinez Neghouache a repris ce point de vue en tentant d'améliorer la scénographie et en introduisant des chorégraphies, censées allégées la représentation, et en ajoutant un quatrième personnage, qui n'a pas apporté grand-chose à la pièce.