Entendu par les enquêteurs, Kheladi Mohamed, directeur du nouveau programme de l'autoroute Est-Ouest au niveau de l'Agence nationale des autoroutes (ANA), n'y va pas avec le dos de la cuillère. Il affirme avoir été informé par Addou Tadj Eddine (homme d'affaires en détention) de malversations dans lesquelles seraient impliqués des cadres du ministère des Travaux publics, des dirigeants de la société chinoise Citic et Chani Mejdoub, qui se dit représentant du DRS à l'étranger. Kheladi connaît Chani depuis plus d'une année en tant que financier de la Citic (entreprise présentée comme étant la caisse noire du DRS). Selon lui, il l'a sollicité pour régler le contentieux né du fait que la Citic voulait utiliser dans ses chantiers du tuf traité en ciment au lieu du non traité convenu dans le contrat. Le tuf traité ne répond pas aux normes techniques retenues dans le cadre du marché et est acquis à un prix dérisoire par rapport au tuf traité en ciment. Ce qui pousse le ministère des Travaux publics à s'y opposer. Kheladi qualifie Chani de « suspect », surtout depuis que Addou Tadj Eddine, a attiré son attention sur le fait qu'il travaille en même temps pour le compte du DRS et pour celui de la Citic. Addou va jusqu'à saisir le ministre Amar Ghoul sur son cas, en vain. Kheladi, qui chapeaute tous les projets de son département, fait état de nombreuses affaires de corruption dans les domaines des transports, de l'hydraulique et des travaux publics. Il se montre très prolixe en révélations. Il déclare avoir rencontré, lors de son voyage en Chine, Philippe Shan, un homme d'affaires chinois qui lui fait savoir que des commissions de 4% du montant du contrat de l'autoroute Est-Ouest obtenu par la Citic sont versées à Chani Majdoub, 4 autres à des cadres de la Citic et 1,25% à un certain Kouadri de Chlef, qui représente les services du ministère des Travaux publics. Il cite également Addou Sid Ahmed, un autre homme d'affaires (cousin de Addou Tadj) qui sert d'intermédiaire à de nombreuses sociétés étrangères pour leur obtenir des marchés en contrepartie de commissions. La réussite est rendue possible grâce aux bons services, bien rémunérés, de Hamdane Salim Rachid, directeur de la planification et de la coordination au ministère des Transports. Dans le contrat de suivi et de contrôle du tronçon Est de l'autoroute, c'est Addou Sid Ahmed qui est intervenu au profit de la société italienne Inco, grâce au chef de cabinet du ministre des Travaux publics, le nommé Ferrache Belkacem, auquel il remet une somme de 500 000 DA, coût de ses vacances en Turquie, en attendant le versement du reste de sa commission devant être défalqué du montant de 300 000 dollars que Addou avait perçu. Addou est également sollicité pour arbitrer un conflit qui oppose le Groupement mixte des travaux publics (GMTP) composé de la société italienne Pizarotti et de deux autres entreprises, à l'Agence nationale des autoroutes relatif à la demande du groupe d'augmenter les honoraires, estimés entre 10 et 12 millions d'euros. Une mission qu'il va accomplir avec l'aide d'un certain Aït Kaci Boudjemâa, conseiller proche d'un certain Khata, membre du conseil d'administration de la Société de gestion des ports. En contrepartie de ce service, une commission de 5% du montant du marché est remise aux concernés, soit 500 000 euros, dont 30% sont versés à Addou et le reste partagé entre Khata et Aït Kaci.