Moudjahid, premier responsable de la Cinémathèque d'Alger, Abderahmane Hacène El Hadj, originaire de Tizi Ouzou, s'est retrouvé dans la rue après de loyaux services rendus à la patrie. En dépit des efforts considérables consentis durant la guerre de Libération nationale, nombreux sont ceux qui continuent à vivre le calvaire dans une Algérie indépendante. Ils vivent actuellement dans le dénuement le plus total en raison de l'indifférence affichée par les pouvoirs publics à leur égard. Détenant des attestations de reconnaissance comme moudjahid de la Révolution, mais cela n'est aucunement un gage susceptible de leur assurer un quotidien sans difficulté. C'est le cas, d'ailleurs, de Hacène El Hadj Abderahmane, ce moudjahid de 69 ans qui continue à souffrir le martyre, notamment depuis son expulsion de son logement de fonction qu'il avait occupé pendant plus de dix ans au niveau de la maison de la culture Mouloud Mammeri de Tizi Ouzou. Actuellement, il est logé provisoirement dans un appartement modeste, dans la ville de Tizi Ouzou. Hacène El Hadj a rejoint, en 1956, après la grève des étudiants, alors qu'il était lycéen, les rangs des militants de la zone d'Alger. Puis il a été arrêté par l'armée française en août 1957. Il est libéré le 19 mars 1962 après le cessez-le-feu. Depuis l'indépendance, il a assuré plusieurs postes de responsabilité dans des structures du ministère de la Culture. Ce docteur d'Etat en sciences de l'art était directeur de l'Institut national des arts dramatiques de Bordj El Kiffan, puis premier responsable de la Cinémathèque d'Alger, et ce, avant d'être suspendu par la ministre de la Culture. D'une galère à une autre, ce moudjahid avait également assuré la gestion de la maison de la culture de Tizi Ouzou. « Si moi je suis dans cette situation, je vous dis aussi que plusieurs grands moudjahidine anonymes qui n'ont pas eu la chance de se faire un nom vivent encore dans la misère. Quand la justice a prononcé mon expulsion d'une habitation considérée à tort comme étant un logement de fonction, appartenant à la maison de la culture Mouloud Mammeri de Tizi Ouzou, je me suis retrouvé, en 2006, à 65 ans, dans la rue avec ma femme, ma fille de trois ans et ma mère de 97 ans, hémiplégique, qui est décédée une année plus tard », nous dit-il, avant d'ajouter : « J'ai passé trois mois d'hiver sur le trottoir. J'ai eu surtout des conséquences sur ma santé. La ministre de la Culture a affiché son indifférence à l'égard d'un homme qui a servi loyalement son pays. Pourtant, en rentrant ‘chez moi' en 1962, arborant une jeunesse usée par un dur combat contre le colonialisme et cinq ans de détention, j'étais loin d'imaginer qu'un jour, je me retrouverais dans une situation aussi pénible et injuste envers un moudjahid qui croyait que le bonheur était pour demain. » Hacène El Hadj Abderahmane attend toujours l'aboutissement de la procédure de sa mise à la retraite. « J'ai même adressé une lettre ouverte au président de la République. » C'était, en somme, le dernier recours de cet ancien moudjahid qui s'est retrouvé dans la rue après des années au service de son pays.