Le porte-parole du gouvernement marocain, Khalid Naciri, a certainement raté une belle occasion de se taire. Alors que son pays est voué aux gémonies par toute la planète pour le sort qu'il a réservé à Aminatou Haïdar, il s'est érigé hier en maître flingueur en dégainant contre sa cible privilégiée : l'Algérie. Ainsi, la grève de la faim de la militante sahraouie ne serait, d'après lui, qu'« un complot systématique, méthodique, ourdi par l'Algérie » ! Dans sa lancée hystérique contre notre pays, le serviteur de sa majesté a poussé l'ignominie jusqu'à accuser Alger de verser dans ce qu'il désigne par une « instrumentalisation odieuse » du cas Aminatou Haïdar. C'est à croire que c'est un flic algérien qui a dépossédé Aminatou de ses papiers marocains à l'aéroport de Casablanca et l'a renvoyée aux îles Canaries ! En bon spécialiste de la géopolitique-fiction, Khaled Naciri a cru déceler la prétendue orchestration d'Alger de l'innommable expulsion. « Le timing est significatif, l'Algérie est en position de faiblesse par rapport au plan d'autonomie mis en œuvre par le Maroc pour le Sahara occidental et qui est bien accueilli par la communauté internationale. » A trop vouloir faire dans la génuflexion au makhzen, ce ministre de la Communication oublie que l'Algérie n'est concernée ni de prés ni de loin par son « plan d'autonomie ». Il ne fait, en réalité que déplacer – maladroitement du reste – le débat d'une odieuse violation des droits de l'homme, contre une femme de surcroît, vers la thèse adorée au Maroc, à savoir que l'Algérie est partie prenante du conflit. Cela transparaît clairement dans les propos du porte-voix de Sa Majesté : « L'Algérie croit avoir trouvé un filon pour s'attirer à bon compte la sympathie de l'opinion publique internationale », explique-il. Cette réaction mesquine saucée d'adjectifs pas très diplomatiques à l'égard de notre pays, dénote d'une panique royale. « L'affaire » que le makhzen voulait plier en se débarrassant du « corps » frêle d'Aminatou Haïdar est revenue comme un boomerang pour éclabousser les dirigeants du Maroc et discréditer un « plan d'autonomie ». Désormais, le monde entier a eu le loisir de découvrir, en « live », de quoi est capable le commandeur des croyants contre une jeune femme : la séparer de ses enfants en la jetant comme une malpropre dans le hall d'un aéroport canarien ! Son péché ? Etre restée fidèle à sa mère patrie, le Sahara occidental, malgré son occupation illégale par les soldats de sa majesté. C'est sans doute ce tollé mondial qui fait perdre la tête à Khalid Naciri au point de perdre la raison… « L'Algérie s'en tient au discours éculé de la Guerre froide. Le Mur de Berlin est tombé en Europe et un autre est érigé par l'Algérie » sur la frontière algéro-marocaine. Ce ministre aurait été plus inspiré de noter que le « mur de la honte » que son pays a érigé entre les territoires occupés et ceux libérés du Sahara occidental reste le seul et unique mur de séparation encore debout au monde ! Signe aussi du pacte diabolique concocté avec Madrid contre Aminatou, le porte-parole du royaume estime que « le Maroc et l'Espagne sont victimes un plan machiavélique (…). Nous sommes attristés, désolés, de constater que l'on essaie de manipuler l'opinion publique internationale avec cette affaire ». Cela prouve que la médiatisation de l'affaire a fait trop mal. Signe d'un partage des rôles entre Rabat et Madrid, Khalid Naciri verse une larme de crocodile sur la posture de grand complice de Madrid :« Nous sommes solidaires de l'Espagne. Elle peut être assurée de l'amitié et de la considération du Maroc. » Tant qu'a faire, il aurait été plus sage pour notre ministre de réclamer plutôt de l'Espagne la restitution des îles Persil, situées juste à 200 m des côtes marocaines, ou encore Ceuta et Melilla. Il est, en tout état de cause, évident que ce prétendu « plan de morcellement et de déstabilisation de la région » a été exécuté par le royaume d'Espagne au nez et à la barbe du royaume du Maroc. Il est vrai qu'il y a des réalités que les dirigeants marocains ne souhaitent pas voir. L'Espagne, elle, a tout intérêt à soutenir Rabat dans son conflit avec la RASD pour détourner le regard du makhzen de Ceuta et Melilla. Le deal, c'est celui-là. Laissons donc ce ministre montrer patte blanche par les insanités. « Les injures sont les raisons de ceux qui ont tort », disait Nietzsche.