Même l'accès aux institutions étatiques est bloqué par ces revendeurs, et apparemment on fait avec. En dépit d'une lutte acharnée et récurrente déclenchée régulièrement par les services de l'ordre public, la noria de petits revendeurs de fruits et légumes et autres « chinoiseries » ne lâche décidément pas prise. Délocalisés, pourchassés, verbalisés à longueur de journée, voire malmenés et dépossédés de leurs pesettes, ces derniers n'en ont cure. Ils trouvent toujours le moyen de se déployer quelque part pour écouler à la criée leurs produits. C'est, en somme, le credo de la concurrence déloyale qui se manifeste dans toute son ampleur à travers le foisonnement de centaines de commerces parallèles qui fleurissent, de surcroît, devant les boutiques et les magasins astreints au paiement rubis sur l'ongle de leurs taxes et redevances. Le phénomène est en train de faire tache d'huile, pour ne pas dire prendre des proportions alarmantes et, de ce fait, devra inciter les autorités concernées, à commencer par la wilaya, les APC, les services de l'ordre et la direction du commerce, à coordonner leurs actions et mettre en œuvre des solutions palliatives à même de restituer les espaces publics « envahis » à leur fonction originelle, sinon bonjour les dégâts ! Il y en a certainement qui vous rétorqueront que le commerce informel avec ses multiples ramifications (la friperie, les bibelots et tutti quanti) est l'unique planche de salut pour des milliers de chefs de famille en quête de pitance en ces temps de disette et de chômage sévissant à grande échelle. Mais, de là à ce que toute une armada de revendeurs de fruits et légumes, d'articles domestiques et vestimentaires de pacotille en tout genre vienne à obstruer carrément des tronçons routiers, allant jusqu'à ériger leurs étals devant les administrations et les édifices publics, il n'est pas déplacé alors de penser que l'on a mélangé les torchons avec les serviettes. Des pics d'occupation illégale des espaces publics sont enregistrés tous les jours dans les grandes agglomérations urbaines de la wilaya. Le courroux des commerçants réguliers A Chelghoum Laïd, et à un degré moindre à Mila, Ferdjioua et Grarem, le phénomène fait boule de neige. Comble de l'ironie, l'opération « coup-de-poing » de décembre dernier, déclenchée par les brigades de la DCP, n'a nullement inquiété l'armada des revendeurs à la sauvette et des marchands ambulants. Bien au contraire, c'est la traque tous azimuts des commerçants inscrits qui est lancée sans répit. « La moindre entorse à la réglementation (défaut du registre de commerce, d'affichage de prix, de facturation, etc.) est sévèrement réprimée par les inspecteurs et les contrôleurs de la direction du commerce », ont affirmé plusieurs propriétaires de magasins d'alimentation générale, pâtisseries et superettes. Trouvant l'intervention des contrôleurs aussi sélective que démesurément répressive, la plupart des boutiques ont solidairement baissé rideau. De nombreux commerçants, offusqués par cette volée de bois vert qui consiste à sévir durement contre les marchands réguliers et faire patte de velours à l'égard des barons du circuit informel, ont assimilé cette promptitude à la répression aux « deux poids deux mesures ».