Peur sur la liberté des médias lourds. Les chaînes satellitaires arabes risquent d'être soumises à une étroite surveillance à travers la création d'une superpolice baptisée Office des chaînes satellitaires arabes. Cette dernière, dont le projet de création émane de l'Arabie Saoudite et de l'Egypte, serait chargée « d'imposer une ligne directrice aux chaînes satellitaires arabes, afin de garantir le respect des normes éthiques et des valeurs morales de la société arabe, et afin qu'elles ne servent plus de paravents et de relais aux "terroristes" », rapporte l'organisation Reporters sans frontières. L'organisation de défense des médias et des journalistes qualifie ce projet de préoccupant car « le risque est grand que la création de cette superpolice serve à censurer toutes les chaînes qui ont une ligne éditoriale critique à l'égard de régimes en place », souligne RSF en notant une possible transformation à terme de cette instance en une « arme redoutable contre la liberté d'information ». Le projet en question sera soumis à débat lors de la rencontre des ministres arabes de l'Information prévue aujourd'hui au Caire. Lancé en février 2008 par le secrétaire général de la Ligue arabe, l'Egyptien Amr Moussa, ce projet vient d'être relancé par Le Caire et Riadh suite à la proposition du Congrès américain d'introduire une loi qualifiant de « dirigeants d'organisations terroristes » les propriétaires des satellites ayant contracté des droits de diffusion avec des chaînes classées par le même Congrès de « terroristes ». Par leur projet, l'Egypte et l'Arabie Saoudite qui contrôlent, pour la première le satellite Nilesat et pour la seconde Arabsat, semblent viser trois chaînes principales que sont Al Jazeera du Qatar, Al Aqsa du Hamas et Al Manar du Hezbollah. Le Liban et le Qatar se sont déjà positionnés contre ce projet que beaucoup assimilent à un comité de censure. Les autres pays arabes s'exprimeront aujourd'hui sur cette question qui pose encore une fois cette alliance égypto-saoudienne qui ne peut être débarrassée de l'arrière-pensée politique entourant la création de cet office. La seule moralisation des médias ne peut être le seul souci de ces deux pays alliés inconditionnels des USA dans la région et surtout adversaires acharnés des chaînes de télévision citées ci-dessus. Les 22 pays arabes sont divisés sur cette question et « nombreux sont ceux qui redoutent également qu'à terme, cet office n'en vienne à contrôler le contenu même des médias privés. La question de la perte de souveraineté est soulevée », indique RSF. Dans une déclaration de cette organisation, il est cité que les membres de la Ligue arabe s'interrogent sur le pourquoi de la création d'une telle instance et qui seront ses membres, comment seront-ils désignés, quelles en seront les attributions exactes, quel sera le pouvoir de sanction et comment sera financé cet office ? A noter que la commission permanente de l'information arabe a qualifié le projet du Congrès américain « d'ingérence dans les affaires intérieures des pays ».